L’Opéra volant

L’Opéra volant
Carl Norac, Vanessa Hié
Rue du monde, 2014

L’Art est vivant, vive l’art !

Par Anne-Marie Mercier

lopera volantSuperbe album, grand format, grand artistes, grandes idées : l’art sauve, l’art est contagieux, il donne envie de le suivre, comme l’air de flûte du joueur de Hamelin.

Oisel, à peine sorti de l’œuf, se déclare artiste. C’est dire si la vie va être difficile pour lui : incapable de chanter juste, inapte à de nombreux travaux ordinaires, récalcitrant pour beaucoup d’autres, il s’essaie à plusieurs métiers sans cesser de poursuivre son but. Un jour, il accepte un travail qui lui semble fait pour lui, livreur d’enfant, comme les cigognes. Les catastrophes s’enchaînent jusqu’à ce qu’il arrive à déposer la petite Léna dans sa ville, un lieu hélas hostile aux oiseux et à l’art. Entre-temps, Oisel aura développé ses talents de raconteur d’histoire, acteur et danseur et réuni autour de lui toute une équipe d’oiseaux divers qui s’emploie avec lui à émouvoir et à faire rêver leurs spectateurs.

Les images de Vanessa Hié sont superbes, composites, chatoyantes. Elles présentent sur fond blanc une troupe d’oiseaux vêtus de costume spectaculaires composés de toutes sortes de tissages et d’imprimés, des matières végétales ou minérales, tandis que les épisodes de l’histoire se déroulent dans des décors stylisés aux couleurs d’un tour du monde.

Turandot, princesse de Chine

Turandot, princesse de Chine
Dedieu

Hong Fei, 2013

Album Opéra

Par Anne-Marie Mercier

turandotAdapté de l’ « Histoire du prince Calaf et de la princesse de la Chine » de Pétis de La Croix » (Contes des mille et uns jours, 1710-1712), cet album qui s’inscrit dans la suite de plusieurs versions célèbres (dont l’opéra de Puccini), propose cette histoire mi tragique mi héroïque à un jeune public, mais aussi à tous ceux que le style chinois de Dedieu enchante.

Après avoir été le savant professeur Tatsu Nagata et avoir raconté plusieurs belles histoires autour de l’art chinois (Le Maître des estampes (Seuil 2011), Dragons de poussière (Hong Fei, 2012)), il monte ce récit comme un opéra en plusieurs actes, chaque chapitre étant séparé par une page-rideau rouge avec des personnages qui semblent inspiré de marionnettes ou de papiers découpés orientaux.

Le texte, bref, parfois elliptique, respecte la langue du dix huitième siècle autant qu’il est possible sans trop gêner la compréhension d’un jeune lecteur. Les dessins à l’encre, colorés, s’inscrivent sur un fond blanc, espace symbolique d’une scène presque vide de décors et d’accessoires et les angles choisis magnifient la geste héroïque du prince, la beauté de la princesse et sa cruauté. Mais tout cela avec un clin d’œil faussement naïf, la grandiloquence étant toujours montrée comme un jeu d’acteurs.

Le format étonnant, haut et étroit (22×38 cm), se déplie en doubles pages généreuses, tant pour le texte, en gros caractères, que pour l’image qui s’inscrit sur des fonds blancs larges.

Voir l’entretien avec Thierry Dedieu à propos de ce livre sur le site de Hong fei.

 

 

Prends garde à toi

Prends garde à toi
Fanny Chiarello
Ecole des Loisirs, 2013

L’inspiration est un oiseau rebelle

Par Christine Moulin

chiarelloVoici le pendant de Holden, mon frère (selon l’auteur elle-même, ce n’est pas une coïncidence). Louise est aussi bourgeoise que … Kevin ne l’est pas. Et c’est là que l’on se rend compte que Fanny Chiarello sait à merveille rendre compte des variations langagières! Toutefois, la truculence du style de Kévin était beaucoup plus séduisante que l’écriture gourmée, très « Auteuil-Neuilly-Passy » de la jeune narratrice. Et puis, il faut le dire, Kévin était tellement émouvant alors que Louise est une pimbêche odieuse à laquelle on a du mal à s’attacher (je sais, c’est voulu, mais quand même).

Même l’intrigue est plus superficielle (en plus, elle comporte, pour les habitués de l’univers scolaire, quelques invraisemblances: a-t-on déjà vu un professeur demander, dès les premiers jours de l’année, à des parents de participer à un atelier d’écriture pour aider leurs enfants à monter une comédie musicale, adaptée de Carmen ?): Louise aime la lecture, elle! (« […] j’ai toujours rêvé de faire partie des rares initiés. C’est pourquoi je suis tant attirée par les livres dont maman, papa ou les documentalistes me disent qu’ils sont trop compliqués pour mon âge. », dit-elle dès la page 11). Mais c’est à l’amitié, à l’humilité et… à l’opéra qu’elle doit s’initier (grâce à son professeur de musique, l’équivalent de la vieille dame de Kévin dans Holden), après toute une série d’épisodes « bac à sable » qui la confrontent à sa grande rivale, Manon, qui, elle, est délicieuse. Tout cela est un peu convenu et bien-pensant.

Une analyse plus indulgente sur le blog « Les riches heures de Fantasia » . Une autre analyse qui va plutôt dans notre sens: celle de Ricochet.

L’opéra dévoilé

L’opéra dévoilé
Sandrine Duclos (texte), Laurent Croizier (conseil scientifique), Estelle Chadelier (illustrations)
Mama Josefa (Tapis volant), 2012

Tout l’opéra en jeux

Par Anne-Marie Mercier

operadevoileLes opéras pour enfants se sont multipliés depuis plusieurs années, mais il manquait un ouvrage qui permette aux jeunes spectateurs de connaître à la fois l’histoire du genre et l’envers du décor. Mama Josefa propose un album maniable qui réussit le tour de force de présenter à peu près tous les aspects de ce spectacle total en quelques doubles pages : l’histoire du genre est évoquée, depuis les premiers spectacles chantés de l’antiquité à nos jours, en passant par l’opera buffa, la tragédie lyrique et le ballet, avec les styles nationaux (italien, français, allemand, chinois…), quelques grands compositeurs, quelques œuvres majeures comme La Flûte enchantée, souvent proposée au jeune public en version courte.

C’est aussi l’occasion de revenir sur des points fondamentaux de la connaissance de la musique : la voix et les voix, la composition d’un orchestre, le rôle du texte et de la musique. D’autres aspects (la scène, les costumes, le vocabulaire spécifique et les traditions, mais aussi le rôle de l’opéra dans l’histoire et la vie sociale, ses liens avec la création en général…) proposent des ouvertures multiples, qui peuvent être prolongées grâce à une biblio-disco-sitographie en fin d’ouvrage . Enfin, de nombreux jeux permettent au jeune lecteur de chercher la réponse à des questions, de compléter l’ouvrage, de mettre cet art en lien avec ce qu’il connaît. Les illustrations allient scènes colorées et documents, gravures ou photos retravaillés : art total au service d’un art total.

peitiehistoiredesjardinsLes éditions Mama Josefa sont décrites sur leur site comme « À la croisée des chemins de l’éducation et de l’environnement »; elles comptent en Aquitaine une centaine d’adhérents, individuels ou associations, et proposent depuis 2010 des documentaires de qualité, respectueux de l’environnement. Le principe :  » apprendre à regarder autour de soi, découvrir le monde pour acquérir des clés et développer une relation joyeuse au savoir ».

vignes et vinsDans la même collection, on trouve un ouvrage sur la préhistoire, le rugby, les rapaces, Sandrine Duclos a participé à Vignes & vins, un monde à découvrir… (ouvrage primé, en lien avec la région de ces éditions, celle de Bordeaux) et à  La Petite histoire des jardins du monde.