Tout feu tout flamme

Tout feu tout flamme
Julia Chausson
À pas de loups, 2025

Déclarations d’amour en métiers

Par Anne-Marie Mercier

Ce grand album apparait comme une sorte de livre d’artiste dans lequel l’autrice des images se serait donné toute latitude, autant sur le plan du graphisme que de la mise en couleurs. Les images en pleine page, imprimées avec la technique de la gravure sur bois, sont splendides. Elles proposent une grande variété de couleurs, où les teintes des fonds contrastent avec celles qui donnent forme aux personnages.
Ceux-ci, représentés de façon stylisée représentent différents métiers : pompier, facteur, jongleur, footballeur, professeur, marchand de glaces, auxiliaire de vie, coiffeur, guide touristique… On peut remarquer que de nombreux métiers sont portés de manière non conventionnelle par des femmes (présidente, footballeuse, grutière, etc.) et d’autres par des hommes (puériculteur, accompagnant).
Le propos dépasse le simple but de faire un catalogue de métiers : chaque image est accompagnée d’une phrase en forme de déclaration d’amour : « tu me rends flou (pour l’opticienne), « j’écoute les battements de ton cœur » (pour le médecin), « tu m’as pris dans tes filets » (pour le pêcheur)…
Livre pour amoureux, catalogue d’expressions lexicalisées, belles images à contempler, il peut séduire plusieurs publics.
Voir le site de l’autrice, qui a illustré la collection des « petits chaussons » chez Rue du monde, pour de plus jeunes lecteurs.

 

 

 

 

C’est mon corps

C’est mon corps
Mai Lan Chapiron

De la Martinière Jeunesse, 2025

Tu es le chef de ton corps

Par Lidia Filippini

Une première mouture de C’est mon corps, publiée en 2024 s’adressait aux tout-petits, à partir de trois ans. Mai Lan Chapiron propose ici une version enrichie destinée aux enfants de six ans et plus (qui pourra paraître un peu simpliste après huit ans selon nous). Elle y aborde avec une certaine dose d’humour les questions liées à l’intimité.
Le lecteur apprend à repérer ses parties intimes, à les nommer, mais aussi à les protéger. Une grande partie de l’album, en effet, est consacrée au consentement. À droite, une question se décline sur un fond coloré : « Est-ce que ta sœur, ton frère / tes parents / les adultes de l’école… ont le droit de toucher tes parties intimes ? », suivie de sa réponse, en lettres capitales blanches bordées de noir : « NON ! ». Tandis qu’à gauche, une illustration, colorée et légère, dédramatise quelque peu le propos de la page de texte. Cette formule, qui revient comme un leitmotiv, donne encore plus de force au message. L’autrice en profite pour glisser délicatement quelques précisions : personne ne peut toucher les parties intimes d’un enfant, pas même en échange d’un cadeau, pas même quand il lui fait des chatouilles, ni avec ses mains, ni avec aucun objet.
Une petite chouette ajoute, avec humour, son grain de sel. Ses remarques amusantes permettent, elles aussi, de mettre un peu de distance entre le jeune lecteur et les thèmes graves abordés.
Plus loin dans l’album, une double-page tranche par son « OUI ! ». Le lecteur y découvre qu’une seule personne a le droit de toucher ses parties intimes : lui-même, et que ce n’est pas interdit.
Enfin, dans cette version destinée aux plus grands, quatre pages permettent d’aller plus loin. L’autrice y détaille les quelques cas où un adulte a le droit de toucher les parties intimes d’un enfant (le bas-âge, le handicap, la maladie). Elle donne également des conseils aux victimes d’attouchements sexuels ou d’inceste : parler à un adulte de confiance, appeler le numéro d’Enfance en danger.
L’autrice, Mai Lan Chapiron est également chanteuse de rap, costumière et créatrice de mode. Victime d’inceste à l’âge de sept ans, elle collabore aujourd’hui avec plusieurs associations d’aide aux enfants. Son premier album jeunesse, Le Loup, a reçu le label « Pacte pour l’enfance« , décerné par le Ministère des Solidarité et de la Santé. Elle intervient dans des écoles, des colonies ou des centres aérés dans le cadre de la prévention contre les violences sexuelles. Avec, C’est mon corps, elle donne aux jeunes lecteurs un outil clair qui détaille précisément ce qui est permis et ce qui ne l’est pas, encourageant les jeunes victimes à demander de l’aide. En famille, cet album pourra permettre d’engager une discussion avec son enfant. Il peut aussi être utilisé en classe (au CP ou au CE1) puisqu’il permet d’aborder les points mentionnés dans les nouveaux programmes d’éducation à la vie affective et relationnelle pour ces classes : « Nommer les parties intimes avec le vocabulaire scientifique précis » et « Savoir protéger son intimité ».

Tous des patates. Apprends à dessiner trois millions d’animaux à partir d’une simple patate

Tous des patates. Apprends à dessiner trois millions d’animaux à partir d’une simple patate
Mathias Friman

Seuil Jeunesse, 2025

Patates pour tous

Par Lidia Filippini

Mathias Friman part d’un constat simple : tous les animaux peuvent être dessinés à partir de l’esquisse d’une simple patate (mais pas le tubercule, précise-t-il, plutôt une forme ovoïdale qui peut être plus ou moins grande et plus ou moins allongée). Cette patate constitue le corps. Reste ensuite à ajouter une tête (une petite patate) et un cou pour maintenir ensemble les deux éléments, puis des pattes, une queue et, parfois, un bec, des cornes, des ailes ou des nageoires. Avec cette technique, l’auteur propose une cinquantaine de modèles et leurs déclinaisons qui permettent au final de dessiner facilement tous les animaux du monde.
Tous des patates pourrait n’être qu’un simple manuel de dessin mais Mathias Friman en profite pour entraîner ses lecteurs vers la découverte de la classification des espèces animales, insistant sur les spécificités de chacune d’elles de manière simple et très claire (« Pour résumer : de l’eau + des branchies + des nageoires = un poisson »). Le livre suit le tableau de « Classification simplifiée des patates » qui apparaît en fin d’ouvrage et constitue une sorte de sommaire. On y trouve cinq grands groupes d’animaux : les vertébrés, les mollusques, les cnidaires, les arthropodes et les annélides (qui ne sont pas des patates, mais des saucisses) avec leurs principales subdivisions. D’un point de vue scientifique, cette classification est quelque peu contestable, notamment parce qu’elle omet le groupe des échinodermes (étoiles de mer, oursins entre autres) qui est important puisque, porteurs d’un squelette interne, ces animaux sont considérés comme proches des vertébrés. Cette absence ne s’explique pas et semble peu justifiable dans un livre que la quatrième de couverture présente comme « un manuel zoologique ».
Quelques approximations scientifiques, donc, qu’il faut garder en tête, mais cela ne nous a pas empêchée de prendre beaucoup de plaisir à lire cet album-documentaire-manuel original. Les illustrations sont drôles et colorées. Elles donnent envie de tenter la méthode des patates et il faut bien dire que celle-ci s’avère particulièrement bien pensée pour dessiner toutes sortes d’animaux.

 

Ma Peau

Ma Peau, le monde autour de moi
Cécile Roumiguière, Marion Duval
Seuil jeunesse, 2025

Tout un monde par la peau

Par Anne-Marie Mercier

Si l’on trouve de nombreux livres à toucher, proposant aux enfants des expériences tactiles avec des matières et des textures différentes, on songe rarement à leur faire verbaliser ce que le sens du toucher leur donne au quotidien : toucher son corps et le découvrir aussi par le langage en nommant ses différentes parties, sentir le chaud, l’humide, le poisseux, le froid, le rugueux, le lisse, le piquant. Ces expériences se font à travers toute sorte de situations quotidiennes : le bain, le coucher, la tartine, le pull qui gratte… et enfin les délices de l’automne (les bogues qui piquent) et de l’hiver.
Le duo d’autrice- illustratrice parcourt les cinq sens avec des petits albums carrés et cartonnés, parfaits pour les tout-petits, aux images simples, lisibles, et colorées tout en douceur pastel. Déjà paru : Mes yeux.

Les Secrets du cerveau

Les Secrets du cerveau
Helena Harastova et Dita Vopradova

Albatros, 2025

Mémoire et imagination

Par Lidia Filippini

Voici un album documentaire aux illustrations colorées et amusantes qui a pour ambition d’expliquer le fonctionnement du cerveau.
La première partie, intitulée « La mémoire », aborde la manière dont les informations sont stockées dans le cerveau. On y trouve des explications précises sur les diverses régions cérébrales et sur leur rôle dans la création des souvenirs. L’autrice s’intéresse également aux différents types de mémoire (à court, moyen ou long terme) et aux liens entre âge et mémoire.
La deuxième partie paraît plus confuse. Le texte se perd dans un fouillis d’images – souvent drôles d’ailleurs, mais qui nuisent à la clarté de l’ensemble. Les notions d’imagination, de pensée et de créativité semblent se mélanger. Les trois termes sont utilisés comme des synonymes, ce qui rend la compréhension difficile et conduit parfois à des approximations (les pensées intrusives, la mythomanie et la synesthésie seraient des dysfonctionnements de l’imagination). Le chapitre intitulé « l’imagination dans la science » m’a laissée un peu perplexe. On y apprend en effet qu’Isaac Newton, qui était « bien trop intelligent pour laisser la place au hasard […] a étudié l’attraction en détail (et grâce à son imagination) avant de définir cette loi. » Je n’ai pas tout compris…
L’album se termine par des « Questions de compréhension de lecture » parfois déconcertantes. Par exemple, la réponse à la question : « Peux-tu citer trois manières de te servir de ton imagination au quotidien ? » est « Quand tu as peur, quand tu prends une décision, quand tu dois planifier et préparer quelque chose. » Ici encore, le terme « imagination » ne me semble pas approprié.
Encore plus gênant, une biographie succincte de l’autrice nous apprend qu’elle n’est « ni psychologue, ni neuroscientifique » mais qu’elle « puise l’inspiration pour ses livres en observant » ses enfants. Une démarche empirique, certes, mais bien peu scientifique. Dommage car ce documentaire avait plutôt bien commencé avec une première partie intéressante et bien construite.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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La Pierre contente

La Pierre contente
Bruno Gibert
Seuil jeunesse, 2025

Bonheur vivant

Par Anne-Marie Mercier

Il y a des gens qui ne sont jamais contents… et d’autres qui se réjouissent de tout. Cette pierre fait partie de ceux-ci. Bien installée dans une prairie d’alpage, elle profite de chaque heure du jour, des saisons, des va-et-vient des autres vivants, elle est une image du bonheur serein.
Mais, les gens heureux n’ayant pas d’histoire, il faut bien que le diable s’en mêle. Un peu comme celui du Livre de Job, le mauvais génie des montagnes qui n’aime « ni les gens heureux ni les choses tranquilles » attaque la pierre. Il la fait tomber en plaine, puis des années plus tard, la voyant toujours heureuse l’envoie dans le torrent, (« formidable ! » se dit la pierre), puis après bien des années, la propulse vers la mer (« quelle chance ! ») où elle devient galet. Enfin il la pulvérise en sable, et la pierre se réjouit des jeux d’enfants pendant quelques siècles avant de (re)devenir poussière et de s’envoler dans le ciel tout bleu.
Au passage, c’est aussi une jolie leçon sur l’érosion et le parcours de l’eau.Voilà une très jolie fable sur le principe du bonheur (savourer l’instant) et les joies du passage du temps : se transformer, découvrir de nouveaux paysages, s’ouvrir à la nouveauté, et enfin disparaitre dans le bleu du ciel.
Comme toujours, dans les livres de Bruno Gibert, la langue est belle, simple et précise, les mots sont autant de jolis galets à manipuler.

 

 

 

Six petites histoires d’art brut

Six petites histoires d’art brut
Sophie Chabalier – Albertine
Flammarion Jeunesse 2025

Aloïse, Augustin, Emile et les autres

Par Michel Driol

L’art brut… On désigne ainsi les œuvres produites des personnes qui n’ont jamais appris à dessiner, à peindre ou à sculpter. Sophie Chabalier, responsable de la médiation et des publics à la Collection de l’art brut de Lausanne fondée par Jean Dubuffet, propose six biographies  à destination d’un public enfantin, dans une langue accessible à toutes et tous, cherchant à être au plus près des artistes dont elle parle.
Une double page est consacrée d’abord à Jean Dubuffet, pour situer sa découverte de ces formes artistiques lors d’un voyage en Suisse. Il sera fil conducteur dans l’album. Puis c’est Aloïse Corbaz, qui cout des feuilles pour peindre des toiles gigantesques, comme un théâtre imaginaire. On se dirige alors vers  l’hôpital psychiatrique de Saint Alban, où l’on fait la connaissance d’Auguste Forestier, dont les sculptures se composent d’objets récupérés. Puis on y rencontre Margurite Sirvins, qui se coud une robe de mariée. Puis on rencontre Augustin Lesage,  mineur, spirite, peintre. Le voyage continue vers Emile Ratier, cultivateur, sculpteur d’objets animés en bois. Et c’est enfin la rencontre avec Scottie Wilson, poète, vagabond, artiste représentant des animaux. Une conclusion met l’accent sur la créativité et la liberté de ces artistes, avant quelques mots d’une biographie plus classique consacrée à chacun d’eux – « à destination des plus grands », dit le texte.
L’album a le grand mérite de faire connaitre ces histoires personnelles, ces parcours de vie qui conduisent certains à se consacrer à une passion artistique, en suivant au plus près leur cheminement intérieur, leurs espoirs, les éléments déclencheurs, les déceptions, les accidents de vie aussi.  Le texte est écrit au présent, rendant ainsi plus sensible chaque épisode de ces vies, chaque anecdote, dans des courtes phrases qui n’hésitent pas à avoir recours à la forme exclamative, façon de montrer l’urgence de la créativité, l’enthousiasme, mais aussi l’admiration face à ces œuvres totalement hors normes. La langue sait aussi se faire poétique, avec des répétitions, des gradations, un véritable travail stylistique. L’album est enfin l’occasion d’évoquer l’Hôpital psychiatrique de Saint Alban, son rôle éminent dans la façon de prendre en charge les patients par des pratiques artistiques, un journal, des voyages…
Les illustrations sont à la hauteur de l’ambition de cet album. D’abord, pour chaque artiste présenté, on a la photo d’au moins une de ses œuvres. Mais Albertine propose un travail plein de fantaisie et de gaité pour faire écho à ces artistes hors normes. Des illustrations souvent d’une facture naïve, exagérant ou faussant la perspective et les proportions, mais surtout rendant hommage à la simplicité des artistes, hommes et femmes du quotidien, saisis à la mine, ou en train de repasser, mais aussi en train de peindre ou de sculpter.
Un documentaire consacré à une forme d’art peu connue, qui se présente comme un voyage à la fois à travers des lieux bien différents, des univers artistiques bien différents, mais aussi à travers des cerveaux et des imaginaires bien particuliers, en marge, mais avant tout libres !

Quand ils sont venus

Quand ils sont venus
Andrée Poulin, Sophie Casson
Editions de l’Isatis (Griff), 2024

Petite fable contre les grandes discriminations

Par Anne-Marie Mercier

« Quand ils sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit.
Je n’étais pas communiste.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit.
Je n’étais pas syndicaliste.
Quand ils sont venus chercher les juifs, je n’ai rien dit.
Je n’étais pas juif.
Quand ils sont venus chercher les catholiques, je n’ai rien dit.
Je n’étais pas catholique.
Quand ils sont venus me chercher,
Il ne restait plus personne pour me défendre. »

Le titre de cet album, « Quand ils sont venus » reprend les premiers mots du texte du pasteur Niemöller, évoquant les persécutions menées par le régime nazi contre les communistes, syndicalistes, etc. L’album reprend le même chemin, en généralisant et en universalisant le propos. Ce « ils », représenté par des personnages en habit militaire et à tête de loup est désigné comme les « Sans Entrailles » : ce n’est donc plus une question de régime ou de pays, mais un groupe de personnes déshumanisées, on aurait pu dire « sans cœur » s’il n’y avait ici la question de la justice plus encore que de la compassion. Néanmoins, l’histoire est convoquée de différentes manières à travers la représentation des camps de « rééducation » qui sont en fait des « camps de la mort ».
Le narrateur, représenté par un sympathique chien anthropomorphe, apostrophe le lecteur en s’excusant de devoir lui montrer des choses terribles : oui, « certains évènements angoissants et répugnants doivent être regardés en face ». Il commence en douceur, évoquant l’histoire de son grand-père, qui vivait au bord du Lac Paisible, en paix avec ses voisins, renards roux, loups, coyotes, fennecs, ou grands chiens comme lui. Il ne réagit pas lorsque chaque groupe est emmené sans motif. Il ne dit rien, parce que « ce ne sont pas ses affaires » et que, somme toute, lui-même trouve que les uns ont une mauvaise odeur, d’autres ont des mœurs trop libres, d’autres sont trop riches… Ainsi tout le mécanisme de l’oppression totalitaire est mis en lumière : il commence en chaque individu avant de gangrener la collectivité, jusqu’à ce qu’un groupe en profite pour s’approprier les richesses, le pouvoir et les corps.
Dans les dernières pages, on évoque l’espoir et la nécessité d’un combat permanent et de tous contre le racisme, le colonialisme, la persécution religieuse, l’homophobie, toute forme d’injustice. Ces notions sont expliquées et mises en contexte de façon simple et claire, même si le propos est adouci par la représentation de personnages animaux anthropomorphes vêtus de couleurs vives. Les images colorées aux pastels gras sur fond blanc sont belles, presque paisibles, comme ce lac au bord duquel vit le grand-père, enfermé dans ses certitudes. Presque trop beau, mais sans doute le faut-il pour que le lecteur accepte de « regarder en face » la triste histoire de l’humanité.

 

Une île st née

Une île st née
Virginie Aladjidi et Caroline Pellissier- illustrations de  Manon Diemer
Saltimbanque 2025

Quand la nature accueille la vie

Par Michel Driol

Quelque part au sud de l’Islande, en 1963, l’éruption d’un volcan donne naissance à une ile, qu’on baptisera Surtsey. Ce documentaire retrace son histoire, et chronologiquement montre comment des traces de vie, d’abord infimes, s’y implantent. Aujourd’hui cette ile est vierge, véritable laboratoire à ciel ouvert, réserve naturelle accessible seulement aux chercheurs quelques jours par an.

L’album se présente comme un livre de bord, avec quelques notations datées en bas de page, et une grande illustration dans des teintes bleutés. On peut ainsi suivre pas à pas, heure par heure, d’abord l’éruption du volcan, Pendant près de trois ans, tant que la lave coule, seuls quelques oiseaux ou insectes survolent l’ile, sans s’y installer. La première plante à y pousser ne résiste pas aux laves qui proviennent d’une ile éphémère voisine. Puis fleurs et lichens apparaissent, des oiseaux viennent nicher, leurs déjections fertilisant le sol sur lequel prospère la végétation. La dernière image montre une vie prospère, variée, forte et belle.

Basé sur des observations scientifiques, le texte énonce des faits, mettant à distance toute émotion (si l’on omet quelques points d’exclamation) jusqu’à la dernière phrase, adressée directement au lecteur, explicitant ce qui était sous-jacent, la beauté et la force de la vie capable de s’installer dans des conditions extrêmes. Les illustrations, au contraire, parfaitement cadrées, soulignent la beauté et le merveilleux de cette naissance dans une atmosphère à la fois réaliste – voir par exemple la délicatesse de la représentation des plantes, des oiseaux, des mammifères – et onirique – dans la représentation de  la lave, du minéral, qui confèrent aux illustrations cette impression de création du monde.

Entre réalisme scientifique et poésie (rappelons les liens étymologiques entre la poésie et la création), un magnifique album qui laisse rêveur, contemplatif, face à la force de la vie et à ses conditions d’apparition dans des milieux hostiles.

Qui es-tu ? Les animaux du monde

Qui es-tu ? Les animaux du monde
Karine Daisay
Saltimbanque 2025

Le tour du monde en 21 animaux

Par Michel Driol

Un imagier tout carton, à destination des plus petits, pour présenter 21 animaux en provenance du monde entier. Si certains sont bien connus, comme le coq, d’autres le sont bien moins, comme le maki catta ou encore le dragon de Komodo. Sur chaque page de gauche, l’animal se présente, dit où il habite, raconte une petite anecdote qui le caractérise, évoque ses habitudes ou son mode de vie. L’illustration le montre dans son environnement, tandis que sur la page de droite figure sa tête qui regarde le lecteur.

Des animaux de toutes sortes, à poils, à plume, à écailles, – à l’exception  notable des poissons – des animaux sauvages ou encore des animaux d’élevage présentent une faune diverse. S’il est question souvent de mâles, on parle aussi des femelles. Mise à part la girafe (terme épicène, le texte ne portant de connotation sexuée), 5 sont explicitement des femelles. Il s’agit de la vache, pour laquelle est choisie la vache sacrée d’Inde, la jument, la lamate, la chatte, la louve  La parité n’est donc pas atteinte, mais on note la volonté de l’autrice de faire une place aux femelles…

Si deux mâles (le coq et le lion) sont assez stéréotypés, l’un qui parade au milieu des poules, l’autre qui attirent les lionnes par sa crinière, les autres animaux mettent plutôt l’accent sur leur pouvoir (la vache sacrée), sur la vie de famille (la louve), la liberté (la chatte de Grèce), leur couleur ou leur habilité à se camoufler. Cela donne donc une image assez variée et fascinante des caractéristiques animales.

Les illustrations, qui mêlent différentes techniques, le collage, le dessin, la couleur, sont très réalistes tout en prêtant aux animaux un visage et un regard parfois très humain, tantôt empli de tristesse (la vache ou le lion), tantôt de joie (le paresseux la girafe).

Un album qui fait voyager autour du monde pour présenter des animaux magnifiques qui sont tous heureux de leur condition.