Voici un oeuf

Voici un œuf
Cédric Ramadier & Vincent Bourgeau
L’école des loisirs (loulou & cie), 2013

Un album en jaune et blanc (et orange…)

Par Michel Driol

voiciunoeufUn album cartonné, donc apriori destiné aux plus petits.
Qui est le premier, de l’œuf ou de la poule ? Ici, c’est l’œuf qui va se métamorphoser, de façon amusante, en poule, après plusieurs essais d’ajouts successifs (queue de dragon, ailes de vautour…) avant que la poule ne ponde un œuf… et l’histoire est prête à recommencer.
Un album « minimaliste » : un texte bref et efficace, qui semble donner des ordres au graphisme (Ajoutez une queue… Oh non, pas celle-là), et un graphisme épuré (fond de terre orange foncé, fond de ciel orange clair se répétant de page en page, sur lesquels change l’œuf, presque à la façon d’un flip book, ).
Un album sympathique, qui permettra aux plus jeunes de retrouver des figures connues (le cochon, le paon grâce  à leurs attributs), et de jouer à une histoire sans fin, celle de la vie.

Oiseau et Croco

Oiseau et Croco
Alexis Deacon
traduit (anglais) par Elisabeth Duval
Ecole des Loisirs, 2012

Pour l’amour des oiseaux… et des crocodiles

Par Christine  Moulin

Il est des livres qu’on est heureux d’avoir rencontrés: l’album d’Alexis Deacon est de ceux-là. Un cadeau.

Tout commence dans l’indistinction originelle des pages de garde. Des œufs flottent dans l’espace, la nuit des temps. La page de titre fait acte de nomination, Oiseau et Croco. Déjà, la typographie indique ce qui risque de séparer les deux héros. Le nom « oiseau » est recouvert de plumes, le nom « Croco » d’écailles, les « o » figurant des yeux manifestement reptiliens. Mais il est vrai qu’une minuscule copule « et » les unit, timide et essentielle.

La première double page a des airs de genèse. Face à l’immensité étoilée, deux œufs sont tendrement posés l’un à côté de l’autre et le texte dit ce que montre l’image, dans l’évidence des premiers moments. La naissance a lieu : le premier à sortir, c’est Oiseau, très vite suivi par Croco. Inquiet, le lecteur attend, si l’on peut dire, le « couac », d’autant que le premier cri du crocodile n’est guère rassurant: « J’ai faim ». Mais non… Les deux bébés découvrent le monde et l’apprivoisent, chacun selon ses compétences: Croco est doué pour trouver à manger, Oiseau pour chanter la beauté des choses ou pour bâtir une maison. Ils comptent l’un sur l’autre pour se réchauffer, se protéger  mutuellement, bref, grandir ensemble. Ignorant ce que leur « nature » respective leur permet ou leur interdit, ils progressent, sans se poser de questions, s’entraînant tous deux à voler ou à « lézarder »… Jusqu’au jour où une rivière les emporte « jusqu’à un lac empli de crocodiles au milieu d’une forêt pleine d’oiseaux ». Les appréhensions du lecteur renaissent…

L’amour fraternel, la tendresse vaincront, par-delà les déterminismes sociaux ou les pesanteurs génétiques… L’image de la fin est une merveille de simplicité et d’émotion. Les derniers mots peuvent alors s’écrire, ceux de l’intimité protectrice à laquelle aspirent les enfants et dont les parents ont la nostalgie, parfois: « Bonne nuit »…

L’avis et l’analyse de Sophie Van der Linden