iM@mie

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Suzy Morgenstern
L’école des loisirs, 2015

Pour ceux qui ont un ado difficile à la maison/pour les ados qui ont des parents difficiles

Par Anne-Marie Mercier

im@mieAllez, encore une idée de cadeau pour ado non lecteur… ou bien de la part de celui/celle-ci à ses parents ou grands-parents?

En effet, on se demande qui profiterait le plus de ce livre : un(e) ado geek, ou sa famille ? Sans doute les deux. Il fait partie des ouvrages qui gagnent à être partagés et commentés, même si la lecture solitaire en est elle aussi délicieuse et instructive. Ceux qui ont eu à partager le quotidien avec un ado rivé à son téléphone ou son ordinateur comprendront parfaitement le propos, et les ados en question comprendront ce qu’ils font vivre à leur entourage.

Les parents de Sam – eux mêmes toujours rivés à leur travail ou à leurs écrans – s’inquiètent de son niveau en français et de son peu de goût pour la lecture alors que le bac de français approche. Ils ont trouvé une solution radicale : l’envoyer finir sa classe de première, sans téléphone ni ordinateur, chez une grand-mère lectrice et non connectée.

Il y a déjà eu un certain nombre de romans de ce type. Mais ici l’originalité vient du fait qu’à force de vanter les mérites d’Internet, le petit fils contamine sa grand-mère qui se met à regarder les petites annonces, les sites de rencontre, écrit à des amis perdus de vue, attend avec impatience leur réponse, etc. Enfin, elle finit convaincue qu’une nouvelle vie s’ouvre à elle, la vraie vie.

Mais du coup, elle néglige le présent, le réel. Elle en oublie le petit fils qu’elle couvait jusque là, elle a le regard vague lors des repas qui sont de plus en plus sommaires, elle n’arrive pas à se lever le matin… Si bien que Sam finit par être très inquiet, les rôles sont donc inversés.

Il y a beaucoup d’autres choses dans ce roman: l’éloge de la lecture et de la musique, une histoire d’amour, la ville de Nice sous ses plus beaux aspects, mais c’est surtout la description attendrie et un peu acide des relations entre le jeune homme, sa mère et sa grand mère qui en fait la plus belle ossature.

Minuit! 12 histoires d’amour à Noël

Minuit! 12 histoires d’amour à Noël
Collectif
Gallimard jeunesse (grand format), 2015

Vite, un livre pour un(e) ado !

Par Anne-Marie Mercier

Minuit! 12 histoiresVous êtes en panne pour offrir un cadeau à un enfant à Noël? Cet enfant est trop grand pour  Le Noël blanc de Chloé (voir chronique ci-dessous?

Alors si c’est un(e) ado, pourquoi pas l’anthologie publiée par Gallimard jeunesse, Minuit! 12 histoires d’amour à Noël ? Ce sont des nouvelles (les ados n’ont pas le temps de lire de longs fleuves), écrits par des auteurs américains à succès (les ados n’aimeraient pas les auteurs français? … ?) – enfin par des auteurs publiés chez Gallimard, dont les excellents David Lévithan et Laini Taylor. Tout cela se passe le soir de Noël ou au 31 décembre (ça vous laisse un peu de temps). Tendres amitiés, amours hétéro et homo, cercles scolaire ou plus exotique.. toutes sortes de manières d’égayer les fêtes, donc sont proposées à votre ado lecteur de plus de treize ans comme cela est suggéré par l’éditeur – davantage si les parents sont un peu rigides et si vous ne voulez ni vous fâcher avec eux ni les changer, dans le cas contraire, à éviter pour sauvegarder la trêve.

Sur le site de l’éditeur :
Humour, émotion, coups de foudre, étincelles… l’amour sur tous les tons par les 12 meilleurs auteurs de la littérature ado. »

On l’aura compris, ce sont de bons auteurs, des auteurs qui plaisent, mais pas les « meilleurs » ! Tiens, pourquoi ne pas revenir à Dickens à propos de Noël?

Holly Black, Ally Carter, Holly Black, Gayle Forman, Jenny Han, Matt de La Penña, David Levithan, Kelly Link, Myra McEntire, Perkins Stephanie, Rainbow Rowell, Laini Taylor, Kiersten White

Le Noël blanc de Chloé

Le Noël blanc de Chloé
André Marois, Alain Pilon
Grasset jeunesse, 2015

Y aura-t-il de la neige à Noël ? Le Père Noêl et la COP 21

Par Anne-Marie Mercier

« C’est beau, un grand ciel bleu, mais pas quand on attend qu’il neige. Il faisait même si chaud que Chloé ne portrait presque jamais ses moufles. Ses joli moufles qu’elle avait hâte de plonger dans la neige pour lancer des boules de neige à ses amis. »

Le Noël blanc de ChloéQue voilà un album de circonstance ! L’hiver semble avoir déserté notre espace et on a une curieuse impression en voyant les décorations de Noël devant une foule vêtue comme au printemps. C’est ce qui désole la petite Chloé qui veut un « Noël blanc » comme d’habitude à Québec, c’est à dire sous la neige, et se demande comment le traineau du Père Noël va pouvoir se déplacer sans neige, et ce qu’elle va faire du cadeau qu’elle attend : des skis de fond. Elle part donc chercher la neige elle-même, en montgolfière, qu’elle dirige avec l’aide de harfang des neiges et d’ours blancs.

Sur des fonds unis, blancs, noirs, blancs (neige, nuit, ciel), Chloé vêtue de rouge, droite dans ses bottes incarne l’avenir : les enfants sauveront-ils la planète ?

A pas de loups

A pas de loups
Germano Zullo, collectif (ill.)
A pas de loups, 2014

 

A pas de velours, une nouvelle maison d’édition depuis 2014

Par Anne-Marie Mercier

a_pas_de_loups-ZulloLes éditions A pas de loups ont commencé leur existence l’an dernier en Belgique, avec un album qui porte le même nom, programmatique du projet : le « personnage » traditionnel est réinventé par une écriture moderne qui choisit de ne pas s’enfermer dans un fil narratif; de multiples illustrateurs montrent toute la variété que l’on peut apporter à un même thème.

Cette nouvelle maison d’édition jeunesse  se définit ainsi : «  à pas de velours, sans bruit, discrète mais bien présente pour stimuler l’imagination des petits loups ! ». Elle a déjà un beau catalogue, à visiter sur son site .

 

Visitons la maison

Visitons la maison
Pittau & Gervais
Galimard jeunesse (Giboulées), 2015

ABC de la maison

Par Anne-Marie Mercier

Visitons la maisonDans le même esprit que les grands albums parus précédemment (Promenade au jardin, Visite au zoo), les auteurs proposent une visite guidée entre les pages par des chemins de couleur : l’un permet de relier les silhouettes de différents membres de plusieurs familles, dont on retrouve les images à coller en page centrale, l’autre relie les objets, cachés sous des rabats à leur initiale qui évoquent parfois les bruits qui leur sont associés, un autre associe les animaux. Beauté du graphisme sur un fond bleu marine, ingéniosité des parcours, mise en éveil et en activité, c’est tout un monde qui se déplie, dans un abécédaire en forme de jeu.

L’écrivain Clémentine

 L’écrivain Clémentine
Roland Fuentès
Syros, Coll. tempo, 2015

Le métier d’écrivain

Par Maryse Vuillermet

 

l'écrivain clémentine image Récit de l’écriture d’un roman où l’on voit l’écrivain Christian Rivage déjà rencontré dans Un écrivain à la maison et dans Un écrivain au jardin, emmener son jeune ami Gérald en Algérie. En effet, il a besoin de sentir, voir, s’approprier son histoire à travers un garçon de l’âge de son héros. Gérald joue en quelque sorte le rôle d’une doublure au cinéma.  L’écrivain veut raconter l’histoire de la découverte de la clémentine par le père Clément dans un verger d’Oran, grâce à la curiosité d’un jeune paysan.

On assiste donc au making of du roman, à sa genèse, à ses balbutiements, à la constitution de sa documentation. Mais le récit que l’auteur veut mettre en place manque,  aux yeux de Gérald de suspens, de rebondissements. Gérald apprenti écrivain et vrai gaffeur va fournir, contre son gré, quelques aventures, donc quelques améliorations au texte. L’écrivain confirmé,  beau joueur,  va accepter et même se réjouir de cette collaboration inattendue mais bienvenue.

C’est également grâce à tous leurs amis algériens, bienveillants et plein de malices que tout va bien se terminer

La révolte d’Eva

la révolte d'eva La révolte d’Eva
Elise de Fontenaille
Rouergue, 2015

Sortir de l’enfer

Par  Maryse Vuillermet

 

  Récit à la première personne fait par Eva qui confie son calvaire.  Son père fasciste, alcoolique, raciste  et violent l’oblige à saluer le portrait d’Hitler, la frappe quotidiennement, et d’autant plus qu’elle  est la seule de ses quatre sœurs à lui résister.   Blonde, intelligente, sensible, Eva se réfugie le plus souvent dasn la forêt, leur maison,  comme celle de l’ogre étant  isolée à l’écart du village,  à l’orée d’un bois.  Là, au bord des étangs,  des rivières elle peut lire, être un instant  au calme.  Son père est si amateur de violence qu’il pratique la chasse, et le tir et qu’il les fait pratiquer à ses filles.  La mère soumise et apeurée ne fait que culpabiliser et craindre son mari.

 Eva ne peut se confier à personne ni à sa meilleure amie ni à ses enseignants. Son seul  confident  est Lechien, un chien sans nom, (dans cette famille, les chiens sont interchangeables),  qui, un jour, pour la défendre,  se dresse contre son maître. Alors,  le père le tue à coups de fusil et abandonne son cadavre en forêt. Eva grandit, son père la bat moins.

 Et puis, un jour, le père s’attaque à la petite sœur. Alors,  que va faire Eva ?

Le sujet est délicat, il pourrait être dérangeant, mais le récit est plutôt réussi. L’auteur a su nous rendre sensibles  à la honte, au silence  mêlés à la soif de vivre,  à  la pitié pour les plus faibles,  de son héroïne. Elle a su aussi faire progresser le récit dans l’horreur, coups puis  meurtre du chien, puis attaque de la petite sœur…

Le Soldat chamane, vol. 1: la déchirure

Le Soldat chamane, vol. 1: la déchirure
Robin Hobb
traduit (anglais) par Arnaud Mousnier Lompré
Flammarion jeunesse, 2015

Etre ou ne pas être soldat en terre colonisée ?

Par Anne-Marie Mercier

chmane Robin Hobb, connu pour sa série fleuve, L’Assassin royal, qui s’adresse à un public d’adultes ou de grands adolescents, a proposé une nouvelle série, sans doute plus adaptée à un lectorat un peu plus jeune, qui garde les ingrédients et les qualités de ses œuvres antérieures. C’est sans doute la raison pour laquelle on la trouve aujourd’hui rééditée en grand format (donc à un prix assez élevé) alors qu’elle est disponible en poche (2008) et depuis 2014 en intégrale (j’ai lu). La série a sa page wikipedia, pour ceux qui ne voudraient pas attendre pour savoir le suite…

Le récit se déroule dans un monde imaginaire, une civilisation qui évoque celle de la fin de l’empire romain, ou des soldats méritants se voient attribuer des terres dans des zones conquises en théorie, mais dans lesquels les anciens autochtones, nomades, voient avec méfiance leurs nouveaux voisins, ou plutôt leurs nouveaux maîtres. Le narrateur, Jamère, est destinéchamane poche à devenir soldat alors que son frère aîné doit hériter du domaine ;  il craint de ne pas être à la hauteur. Pour l’aguerrir, son père, ancien soldat, le confie à l’un de ses anciens ennemis, un guerrier nomade. L’apprentissage que subit Jamère entre ses mains est non seulement rude mais aussi dangereux; il l’amène à entrer dans le domaine de la magie, domaine qui le marquera durablement à son insu.

Réflexion sur le heurt des civilisations, sur les clivages sociaux fondés sur la naissance, sur l’oppression sous toutes ses formes, sur l’amitié et l’éducation, c’est un roman d’aventure complet et prenant qui s’achève en laissant le héros en proie au doute sur toutes les certitudes qui avaient bercé sa jeunesse jusqu’alors.

On retrouve avec plaisir ici l’atmosphère crépusculaire de la série  L’aigle de la 9e légion de Rosemary Sutcliff, avec  des aménagements « modernes » : plus de violence et une place importante donnée à  la magie…

 

Lou Pilouface – Le Dieu du Tonnerre

Lou Pilouface – Le Dieu du Tonnerre
François Place
Folio Cadet 2015

Aventures pour de rire en Amazonie

par Michel Driol

francois_place_lou5_couvertureC’est le 5ème tome des aventures  de Lou Pilouface. Cette fois, sa mère, Paméla Diva, donne la 100ème représentation de La fiancée du gondolier à l’Opéra de Manao. Oncle Boniface invite tout le monde à un grand repas, en présence de la directrice du musée, qui parle de la statuette du dieu du Tonnerre, Katakrak. Mais dans la nuit, ce dernier est volé. Dès le matin, oncle Boniface lance tout le monde à bord de son remorqueur Le Coriace à la poursuite du voleur, Gédéon le Brutal. On remonte le fleuve, on franchit des cascades, on découvre les pouvoirs de Katakrak, et de surprenants singes, les guillis oustitis. Finalement, on laissera Katakrak en haut de sa pyramide, et on rentrera avec la statue de la déesse… de la pluie !

Sous la forme classique d’un roman d’aventures exotiques  – narrateur externe, course poursuite, obstacles, tribus menaçantes, décor de temple en ruine, voici un roman complètement farfelu et humoristique. D’abord parce que les personnages sont humains dans le texte, mais animaux dans les dessins (chiens, chats, moutons, rhinocéros pour le méchant). Cette galerie de personnages au cœur tendre (Lou et son tonton – baby sitter) vit des aventures incroyables, dans un univers sauvage et magique, à l’aide d’adjuvants inattendus (le tabasco carburant pour remonter la chute d’eau).. Ensuite parce que l’’écriture est à la fois alerte, rapide et bon enfant, tant dans le récit – au ton souvent familier (excités comme des puces, il rigole à s’en faire mal aux côtes) que dans les dialogues, qui permettent de donner une voix à chacun (les jurons dignes du capitaine Haddock de l’oncle Boniface – Nom d’un casse-croute de piranha -,  le chuintement d’Aristide –chapitaine !). Enfin, parce que les tortures des guillis-ouistitis, comme leur nom l’indique, sont à base de chatouilles en apparence inoffensives.

Un roman d’aventures drôle, illustré par l’auteur, parodie des grands classiques du genre,  qui fera passer un bon moment aux jeunes lecteurs.

L’Ile au trésor

L’Ile au trésor
R. L. Stevenson
Traduit (anglais) par J. Papy
Gallimard jeunesse (Bibliothèque), 2014

Classiques « éternels »?

Par Anne-Marie Mercier

L’Ile au trésorGallimard jeunesse, au temps où le livre semble – à tort ou à raison – en passe de devenir un produit menacé et éphémère, a fait un beau projet, celui de proposer aux adolescents de grands textes à collectionner pour se monter une « bibliothèque », c’est le nom de cette collection. On y trouve Hemingwa, Gripari, Morpurgo, Dahl,

Le texte de Stevenson, traduit par Jacques Papy, est publié par Gallimard depuis 1974 en folio junior avec des illustrations de George Roux, mais a été présenté en 1994 sous forme d’album à couverture souple dans la collection « Chefs-d’œuvre Universels », avec des illustrations de François Place et des photos à usage documentaire (reprenant le principes de Gallimard découvertes). On retrouve François Place comme seul illustrateur, dans ce volume. Ses aquarelles sages évoquent les illustrations d’autrefois et intègrent dans le récit leurs touches de couleur et leur point de vue sur l’histoire..

Cette traduction de J. Papy, comme celle qu’il a faite d’Alice en tentant de rendre le texte plus accessible est un peu ancienne (une traduction s’use-t-elle ? la réponse est « oui », car le regard sur le texte set sur la traduction peut changer). Folio classique propose depuis 2000 une nouvelle traduction, de Marc Porée.