Les Lapins de la pleine lune

Les Lapins de la pleine lune
Camilla Pintonato
Seuil jeunesse, 2019

Au clair de la lune…

Par Anne-Marie Mercier

Chacun sait que dès que les humains dorment il se passe de drôles de choses chez les jouets et chez les animaux. Les « petits » lapins étant à mi-chemin entre le jouet et l’animal, ils jouent doublement bien le rôle d’animateurs des nuits.
L’album, de format carré assez grand, idéal pour y inscrire de nombreux ronds blancs lunaires sur fond bleu de nuit, raconte en plusieurs doubles pages un mystère de pleine lune : ces cinq lapins, « où vont-ils », « que transportent-ils ? » On les suit… L’histoire est contée à travers un texte court en vers de mirlitons, pas plus de deux par page. Les illustrations sont simples, de tonalités sombres (c’est la nuit) avec de vifs contrastes.
Dans un souterrain on découvre un atelier où de nombreux autres lapins s’affairent pour imprimer et découper des invitations que l’on verra ensuite distribuer à divers animaux : « c’est soir de pleine lune, venez ! ». L’attente, scandée par de nombreuses répétitions telles que les enfants les aiment, est comblée par un merveilleux spectacle de lanternes dans la nuit : « Petits lapins tout gris Nous sommes tous éblouis. Juste là, sous nos yeux, la lune brille de mille feux. Autour d’elle dansent les lanternes. Voyez ça comme elles sont belles». Et chacun rentre chez soi : une histoire idéale pour aller dormir ?
L’histoire est simplissime et dure le temps d’une nuit. Elle rassemble divers animaux que les enfants auront plaisir à retrouver. La générosité du spectacle gratuit, pour tous, « vivant », collectif, qui s’appuie sur un simple lever de lune est séduisante, tout comme le rappel de la splendeur de ce spectacle, qui revient tous les mois lunaires, et qu’on oublie trop souvent de contempler.

Les Aoûtiens

Les Aoûtiens
Olivier Douzou, Frédérique Bertrand
Rouergue, 2019

Un OVNI dans le potager

Par Anne-Marie Mercier

Les albums publiés par le duo constitué par Olivier Douzou et Frédérique Bertrand sont toujours une surprise, tant ils sont décalés, drôles et énigmatiques. Ils font partie de ces « petits » livres qu’il faut lire plusieurs fois pour tenter d’en saisir  tous les sens, depuis On ne copie pas (Prix Bologna Ragazzi de la foire du livre de jeunesse de Bologne, Rouergue, 1999), véritable OVNI ou plutôt ANI (Album non identifié) dans le paysage de l’édition pour la jeunesse. Se sont succédé Remue-ménage, (Rouergue-Centre Pompidou, 2000), Les Mauvais Perdants (Rouergue, 2001), Le Conte du prince en deux ou l’histoire d’une mémorable fessée, (Seuil, 2005), Pierre et le l’ours (MeMo, 2007), Le Petit Bonhomme pané  (Rouergue, 2011), Minou, Ours, Teckel, Poney (Rouergue, 2012), Costa Brava (où apparait le personnage de Petit Pierre), Zignongnon, Truite (Rouergue, 2013). Frédérique Bertrand collabore avec bien d’autres auteurs, notamment Michaël Leblond pour la série des Pyjamarama ­– le visage de petit Pierre, dans Les Aoûtiens, est proche de celui de ses personnages dans ces albums). La plupart de ces titres ont été recensés dans li&je.
Les Aoûtiens semble présenter une situation simple : , Pierre, un petit garçon, accompagne son grand-père au jardin et écoute, sans doute un peu distraitement, le long monologue de celui-ci, louant la vie au grand air, la nature, ses qualités de jardinier, et la nouvelle sagesse qu’il a acquise en passant de l’activité de maçon à celle d’amoureux des plantes. Il lui montre les courgettes, les petits pois en passant par les haricots, et s’attarde sur sa variété de tomate préférée, sa « tomate maison » qu’il va laisser mûrir un peu.
Il ne voit pas ce que voit Petit Pierre : une soucoupe volante attaque au canon (un rayon laser ?) le mur de brique qui enclot le potager où broutent Geneviève la vache, Poney (le même que dans un album précédent), Biquette en compagnie de canard (qui ne broute pas), et de quelques oies. La soucoupe volante aspire Geneviève la vache, tandis que l’attaque contre le mur continue. Celui-ci s’ouvre, brique après brique, comme dans un jeu électronique bien connu, puis l’image est grignotée et envahie de blanc, comme si ses pixels colorés fondaient sous le rayon laser, puis de noir. Pendant ce temps, Pierre tente en vain d’attirer l’attention de son grand-père et les autres animaux s’affolent avant de passer à l’attaque, subissant plusieurs changements. Enfin, la nuit est tombée, Pierre et son grand-père rentrent à la maison. Le lendemain, la tomate « maison » est habitée… Le mieux est donc l’ennemi du bien, n’est-ce pas Grand-père ?
On peut prendre cela comme un récit « vrai ». On peut aussi le lire comme un récit double, montrant d’une part la scène entre le grand-père et son petit-fils tandis que le jour décline sans que le grand-père s’en rende compte (« avec tout ça on n’a même pas vu la nuit tomber », dit-il, à la fin), d’autre part ce que Pierre imagine, perclus d’ennui face à ce long monologue plein de lieux-communs. Alors que le texte est accaparé par le grand-père, l’imaginaire enfantin se déploie dans l’image, sous bien des facettes : extraterrestres, jeux de console, film de cow-boys ou de cape et d’épée, animaux humanisés, jouets animés… mots pris au pied de la lettre (comme « maison »). On retrouve le talent que Frédérique Bertrand avait montré dans le très beau et très juste Le Mensonge (Rouergue, 2016), avec un texte de Catherine Grive, qui représentait à merveille la pensée enfantine

Quant au titre, je ne sais pas comment le comprendre : désigne-t-il le fait que Pierre est en vacances ? Alors pourquoi ce pluriel ? inclut-il le grand-père retraité ? ou bien désigne-t-il les envahisseurs ? Je sèche… Sans doute Poney a-t-il la réponse ? Ou vous?

 

 

 

 

 

 

 

Encore une histoire d’ours

Encore une histoire d'ours
Laura et Philip Bunting
traduit de l'anglais (australien) par Rosalind Elland-Goldsmith
Kaléidoscope, 2020

Postmodernisme à la maternelle

Par  Christine Moulin

Tout commence normalement : "Il était une fois..." mais très vite, le protagoniste de l'histoire interrompt la narration pour protester: il y a trop d'histoires d'ours et cela l'empêche de dormir car il est toujours sur la brèche. Il s'ensuit une grève que l'auteur essaye de réprimer en ridiculisant et torturant son personnage, en une forme parodique de récit cumulatif, dont les références ne sont pas absentes: "Et il fit un gros bisou baveux à une grenouille pour la transformer en prince charmant". Après négociation, l'ours essaye alors de trouver un héros qui pourrait le remplacer. On se croirait alors dans la publicité, que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, "Le casting de La-Vache-qui-rit" : à chaque fois que l'ours propose un animal, l'auteur oppose une objection, toujours drôle et souvent fondée sur un jeu de mots. A côté d'animaux bien connus, il y en a de plus surprenants, comme la roussette ou le poisson-globe, mais à tous les coups, la réplique de l'auteur fait mouche (non, il n'y a pas de mouche, pourtant...) . La chute en forme de compromis et de mise en abyme est un nouveau clin d’œil à un conte bien connu.

Le texte est émaillé de traits d'humour subtils comme lorsque l'ours énumère les "activités géniales", "par exemple, dormir, roupiller ou faire la sieste" ou lorsqu'une interrogation gourmande ("où est passé le saumon?"), quasi passée inaperçue, resurgit bien des pages plus loin, initiant les bambins à un procédé qui ressemble au  "set up pay off". Les illustrations sont malicieuses mais toujours lisibles. Bref, tout est délicieux dans cet album qui plaira sans aucun doute à l'adulte sommé de le lire mais également , peut-être pour d'autres raisons, à l'enfant qui l'aura embauché!

 

Grandir

Grandir
Laetitia Bourget, Emmanuelle Houdart
(Les Grandes Personnes), 2919

Vie universelle

Par Anne-Marie Mercier

Qu’est-ce que grandir, et même (bien que le mot n’apparaisse pas), vieillir ?
La réponse nous est donnée par une narratrice, celle dont le double visage nous sourit en couverture, une moitié jeune, une moitié âgée. Elle nous dit les différentes étapes de son existence, pas à pas : « d’abord je n’étais pas là / Et puis j’étais là mais alors juste moi / Et puis je me suis équipée un peu / puis beaucoup » : l’enfant-œuf à peine éclos se charge de propriétés, de capacités, d’objets et de vêtements; on retrouve le style dEmmanuelle Houdart, japonisant et enveloppant les corps de toutes sortes d’étoffes et d’objets.
Autre évolution : le corps se transforme : d’abord petit, fin, souple, puis « beaucoup moins ». L’esprit change aussi : l’être joyeux, curieux, insouciant… mais aussi dépendant et doutant, devient plus solide, plus assuré ; il reste toujours joyeux, par décision, et cherche à se rendre utile autant et tant qu’il le peut… chaque étape montre un corps ou une partie du corps qui se métamorphose sous les tatouages, vêtements, accessoires, un corps qui vole ou se fige, tout cela délicatement dessiné sur fond blanc. Chaque page est une œuvre à part entière, fourmillant de dessins, dynamique et autonome, tout en renvoyant à l’ensemble.
Des images de croissance végétale, de racines et de floraisons, et la présence de multiples animaux donnent à cette vie un ancrage fort dans le monde naturel et ajoutent une autre dimension aux images, parfois étranges : l’humain se fait hybride; il est, comme les plantes et les animaux, dans l’ordre du vivant.
À l’issue des dernières étapes viennent la solitude, l’oubli, puis la disparition. Ces passages sont évoqués de façon douce mais poignante. La dernière image est une parfaite représentation de la présence / absence et du parcours d’une vie faite de beauté et d’amour des formes et des couleurs. Grandir, c’est un beau voyage et un beau dess(e)in, nous dit la fusée – crayon de couleurs qui ouvre et ferme l’album.
Michel Driol avait déjà chroniqué cet album dans un très bel article sur lietje.

Feuilleter sur le site de l’éditeur
Pour mémoire : si on ne présente plus le duo Emmanuelle Houdart-Laetitia Bourget (voir sur lietje), Laetitia Bourget est aussi l’auteure de Ma Maison, publié avec Alice Gravier chez le même éditeur.

Les Choses qui s’en vont

Les Choses qui s’en vont
Béatrice Alemagna
Helium, 2020

Autant en emporte le vent…

Par Anne-Marie Mercier

Malgré l’écho nostalgique du titre, le propos est léger et heureux : ce qui s’en va, ici, ce n’est pas la jeunesse, les amours, les être aimés, le temps… non, rien de tout cela, qui ne ferait d’ailleurs pas sens pour l’enfant.
C’est une égratignure qui s’efface, une bulle de savon qui se dissipe ­­– pour aller où ? – les larmes, la peur, les poux… tout cela donne l’idée d’une vie légère, où un coup de vent peut tout changer, et faire partir ce qui est représentés ici à grands traits (ou pointillés) sur des feuilles de calque : il suffit de tourner la page transparente pour que l’image apparaisse débarrassée des traits qui l’obscurcissaient (les idées noires), ou simplement de signes qui altéraient le blanc (la musique).
Les images mêlant peinture et crayonnés aux pastels gras montrent des personnages de tous les âges, de toutes couleurs de peau, sous des angles divers et dans des situations quotidiennes variées : faire du vélo, prendre un thé, bricoler, dormir : toutes sont des occasions pour se souvenir que tout passe… sauf une chose : vous aurez deviné laquelle ?
Un bel exemple de philosophie légère et heureuse.
Cet album a été et sera offert à tous les enfants du Val de Marne nés en 2020.

Fables d’aujourd’hui

Fables d’aujourd’hui
Yvan Pommaux
L’école des loisirs, 2019

Quand Pommaux rime et fabule

Par Anne-Marie Mercier

Ce sont bien des fables, qui proposent une morale de sagesse à tous, souvent à travers des personnages animaux anthropomorphisés  : à ceux qui se trouvent laids et désespèrent d’être aimés, ceux qui sont en proie à la jalousie, ceux qui hésitent entre deux amours, ou qui optent pour le repli égoïste, ceux qui sont harcelés par d’autres enfants, ceux qui ne veulent pas que des étrangers viennent chez eux, ne serait-ce qu’un petit moment, pour se reposer d’un long voyage.
On voit à travers certains de ces thèmes que ce sont bien des fables pour aujourd’hui ; elles  proposent aux jeunes lecteurs des réponses aux questions qui les tourmentent : comment se faire aimer, comment aimer, comment être protégé…

Et ce sont des fable d’Yvan Pommaux, autre point attirant : on retrouve son art de la ligne claire, et ses personnages animaux  évoquent d’autres, bien présents dans ses albums : beaucoup de chats, des souris, des oiseaux qui évoquent le monde de Corbelle et Corbillo, mais aussi des lapins, des taupes, des éléphants… on retrouve aussi son art du texte ; certes, il n’est pas connu comme un poète, mais il fait bien le travail, jonglant avec les mètres (alexandrins, octosyllabes, hexamètres…)  et ses vers ne manquent pas de charme et de rythme :
« Roger, gros comme un éléphant,
Et d’ailleurs c’en est un,

N’écoute pas les mots ressassés et lassants
De tous les importuns

 qui rient de son poids , sa lenteur, sa maladresse.
Il pourrait leur donner des leçons de vitesse,
Et des cours de légèreté !
Son énergie déborde.
Une tasse de thé,
Et hop sur son skateboard,
Il devient la libellule. »

Pas mal, non ? La fable se termine par une invitation à d’autres lectures :
« Oublions la morale,
Et laissons nous bercer,
Dans un lieu sidéral,
Le temps peut s’arrêter,
Là on n’explique rien,
On est cool, on est bien. »

Bon été!

(lire un extrait)

Vert. Une histoire dans la jungle

Vert. Une histoire dans la jungle
Stéphane Kiehl,
De La Martinière jeunesse, 2019

La couleur de l’espoir ?

Par Anne-Marie Mercier

Au commencement, dans l’album et dans les mots, il y a le vert, du vert partout. Le narrateur, un enfant, arrive du « nord » pour s’installer avec sa famille dans la jungle. Il découvre un pays merveilleux où la nature s’offre à eux, menaçante parfois, mais toujours belle et vivante, parcourue par les éléphants, mais aussi les tigres. Les pages sont couvertes de ce vert qui couvre le blanc de la page : ne reste que l’espace nécessaire au texte.

L’album est le récit d’une déforestation, lente au début avec l’arrivée d’autres habitants, la création d’un village. Le blanc gagne progressivement l’image ;  il laisse aussi la place au noir, celui des souches des arbres que l’on a abattus. Si le vert revient, c’est sous la forme du fantasme, à travers le personnage du tigre, revenu grâce au récit de l’enfant devenu adulte: les couleurs reviennent, présentes dans l’image mais absentes dans le réel décrit par un récit plein de nostalgie.

C’est un bel album, elliptique, qui dit la fragilité de notre monde sans dogmatisme, à travers un simple exemple. Il laisse aussi de la place à l’imaginaire à travers la force de l’évocation par les mots et les images d’un paradis à jamais perdu : le nôtre, demain ?

Chapeau d’été et L’Air du Printemps

Chapeau d’été
L’Air du Printemps
Jo Witek, Emmanuelle Halgand, Flavia Perez (musique)
Flammarion (Père Castor, « areuh, l’éveil en mots et en musique »), 2020

Livres CD pour les tout petits

Par Anne-Marie Mercier

Beauté des images aux formes simples et lisibles, aux couleurs acidulées, rythme du texte, orienté l’un sur les fleurs et les oiseaux (le printemps), l’autre sur les sensations liées à la chaleur, à la lumière et à la fraicheur de l’eau (l’été), originalité de la musique, pleine d’échos d’oiseaux pour la première, plus jazzy pour la seconde, autour d’onomatopées et d’assonances (chat et chaud)… tout est joli et plaisant, pour les enfants comme pour les adultes.
Les textes sont simples — celui de Chapeau d’été tout particulièrement — sans être pauvres et évoquent des moments de sensations partagées, d’attention aux petites choses.
Ces petits albums aux coins arrondis, de format carré, aux pages cartonnées et lisses sont en plus prêts à être pris en main par les petits auditeurs, une fois la première approche faite. Ils invitent à une lecture à deux, à redire les bruits des insectes, des pas dans l’eau… de la vie, et à savourer les couleurs, les musiques et les mots.
Feuilleter chapeau d’été
ou L’air du printemps

 

Tous ensemble !

Tous ensemble !
Smriti Prasadam-Halls, Robert Starling
Gallimard Jeunesse, 2020

 

Fable Politique

Par Anne-Marie Mercier

Les animaux, de La Fontaine à Orwell, sont bien souvent les acteurs de fables à visée politique. Celle-ci, au titre programmatique, allie la simplicité du message à la force de son argumentaire.
Des animaux vivent en paix, les oies et les canards d’une part, sur une petite île, et les autres animaux d’autre part, dans une ferme reliée à l’île par un pont. Les oies décident de faire sécession pour profiter seules de leurs avantages ; les canards, minorité contrainte au silence et exploitée, sont embarqués malgré eux dans cette décision. Étape après étape, ce choix s’avère malheureux, jusqu’à l’arrivée des renards…
L’éloge de la solidarité s’accompagne ici d’une mise en garde : le séparatisme crée un alourdissement des tâches, qui ne sont plus partagées (tiens, tiens, ceux qui veulent mettre les étrangers dehors sont-ils prêts à aller aux champs et ramasser les poubelles ?). Il crée de la pénurie, de la pauvreté et de l’insécurité face aux ennemis. La solidarité n’est pas seulement une belle idée, c’est une nécessité de survie pour une société.
La gravité du message est allégée par le contexte animalier et les illustrations colorées, proches de la caricature : les images représentant les oies et les canard au travail, affublés de tenues de travail (casques, et casquettes) alors que les autres animaux, en face de l’île,  gambadent et donnent envie de les rejoindre sont très réussies.

Trois petits animaux

Trois petits animaux
Margaret Wise Brown, Garth Williams
MeMo, 2019 (1956)

 

Trois oursons s’aimaient d’amour tendre…

Par Anne-Marie Mercier

« Il était une fois trois petits animaux dans leur fourrure d’animaux ils vivaient dans une petite maison d’animaux ».
L’image du bonheur simple de ces petits êtres (qui à l’image sont des oursons) est à peine installée que celui-ci est troublé par l’envie de l’un d’eux d’aller voir « le monde des gens ». Il s’habille (chapeau melon etc.) et il part. Il est vite suivi par un deuxième qui s’habille (petite robe et chapeau à brides, etc.) et part. Le troisième part à son tour, à leur recherche, habillé avec ce qu’il a pu trouver : un pot de fleur comme chapeau, des buches creuses comme chaussures, des feuilles comme manteau. L’album montre les tribulations de ce petit animal inquiet, perdu dans une foule qui ne le voit pas. La fin montre les retrouvailles et le retour à la vie sans habits, à la maison, au sommeil partagé, « car c’était de petits animaux ».

Le charme indéfinissable de cette histoire tient peut-être à sa simplicité (son thème est aussi celui de la fable des « deux pigeons » : « L’un d’eux s’ennuyant au logis / Fut assez fou pour entreprendre / Un voyage en lointain pays »), au lexique restreint, à l’évocation d’un bonheur simple fait de petites choses et de sensations douces, opposés à l’inquiétude et à la dureté du dehors. Elle tient aussi aux illustrations, merveilleuses de douceur et de naïveté, à l’image de ces petits animaux crayonnés avec amour.