Ping Pong – Le livre des contraires

Ping Pong – Le livre des contraires
David A. Carter
Gallimard Jeunesse 2021

Pop-up en mouvement

Par Michel Driol

Gauche / droite, Gros / petit, en haut / en bas… ce sont sept contraires que cet album illustre. La technique est la même : grâce à un ingénieux système de pliage en accordéon, l’image s’anime et change quand on incline le livre de gauche à droite.

Les contraires proposés sont des classiques, mais nommés avec humour (riquiqui / géant) et déjà illustrés par la typographie choisie (disposition dans la page, couleurs, taille…). Ils permettent aussi de belles illustrations, surprenantes et originales (beaucoup / un peu). Les couleurs, pures et très vives, laissent une impression de joie et gaité.

Une belle création de David A. Carter, qui s’avère l’un des plus grands auteurs actuels de livres animés et de pop-ups inventifs.

Là-bas

Là-bas
Gérard Moncomble – Zad
Utopique 2021

Un voyage immobile

Par Michel Driol

Dans une brocante, Max vend à un drôle de bonhomme un masque africain qu’a rapporté du pays son oncle. Il revoit ce masque dans la vitrine d’un coiffeur pour homme, avec lequel il va sympathiser. Ce dernier, homme solitaire, ne parle que d’Afrique, alors que, visiblement, il n’y a sans doute jamais mis les pieds. De là nait une relation improbable entre un vieil homme et un petit Africain, qui n’a jamais mis les pieds en Afrique non plus…

C’est d’abord le récit d’une amitié entre deux personnages attachants d’âges et de cultures différentes. L’un est un coiffeur traditionnel pour hommes, qui a sa vie derrière lui, et semble trainer sa solitude – à l’image de son salon désert. L’autre est fils d’Africains, relié au pays son oncle qui voyage, pris entre deux cultures, entre ici et là-bas. Mais, au-delà de cette amitié et de la façon dont la famille africaine va, en quelque sorte, faire une place et adopter le coiffeur, le récit met le récit en abyme.  En effet, il  met en scène deux personnages qui se racontent des histoires, autour d’une passion commune pour là-bas, une Afrique fantasmée. Si celle-ci est le lieu d’origine des parents pour l’enfant, lieu qu’il n’a jamais vu faute d’avoir les moyens d’y aller, que représente ce continent pour le vieil homme qui semble s’y inventer les souvenirs d’une autre vie ? Le récit laisse le lecteur échafauder ses propres hypothèses. L’Afrique devient alors, dans leurs discours, un lieu magique, fabuleux, peuplé d’animaux étranges : leur Afrique, érigée au rang de mythe, à laquelle eux deux semblent croire, comme un lecteur « croit » une fiction.

Zad illustre ce récit en donnant vie à ces deux étranges personnages, souvent saisis dans des décors qui leur donnent toute leur humanité, dans une palette colorée et sensible.

Une histoire à la fois émouvante et pleine d’humour, sur une relation à la fois intercontinentale et intergénérationnelle, pour évoquer les liens qui nous unissent.

La plus belle de toutes

La plus belle de toutes
Rachel Corenblit
Rouergue 2018

La téléréalité mise à nu

Par Michel Driol

La plus belle de toutes, c’est le nom d’une émission de téléréalité dans laquelle s’affrontent six candidates de 16 ans pour obtenir le titre. Chaque jour, les producteurs ont imaginé un scénario pour faire monter les rivalités entre filles, les ridiculiser, ou les magnifier. Sauf que tout ne se passe pas comme prévu…

Rachel Corenblid propose ici un roman très polyphonique, donnant la parole au présentateur, aux candidates, aux producteurs, aux assistants, pour démonter et exposer les mécanismes sur lesquels reposent les émissions de téléréalité, leur façon de construire des images et de montrer des personnages qui n’ont rien à voir avec les personnes réelles. On retrouvera ainsi un présentateur vedette, dont la copie conforme sévit toujours à la télévision. Dans ses petites phrases, ses tics de langage, il sera facile à reconnaitre. Chacune des candidates est la voix d’un chapitre. Ce sont sans doute les passages les plus émouvants du texte, où l’autrice montre le décalage entre la personnalité, les motivations des candidates, somme toutes des filles sensées et ordinaires (sans que ce mot ait quoi que soit de péjoratif) et dont le montage, les propos du présentateur, font des stéréotypes à mille lieues de ce qu’elles sont réellement : la princesse, la rebelle, la magnifique… C’est aussi ce personnage de Chocolatine, animatrice manipulatrice de l’émission, dont le grand talent est de monter les filles les unes contre les autres, alors qu’elle avoue simplement ne rien savoir faire d’autre.

Malgré la scénarisation programmée, l’émission ne se déroule pas comme prévu, et les candidates vont retrouver le sens de l’union, une certaine solidarité, et refuser de jouer le jeu qu’on entend qu’elles jouent, prouvant qu’il est possible de se révolter contre le mensonge, les faux semblants, les sentiments truqués. On ne révèlera pas ici la fin du roman, inattendue, qui ne laissera pas les lecteurs indifférents et leur donnera matière à réfléchir et à s’interroger.

Un roman où l’autrice met tout son talent à démonter les mécanismes de la téléréalité, non sans humour, et souvent avec brio.

Petit Pêcheur, grand appétit

Petit Pêcheur, grand appétit
Suzy Vergez
Rue du Monde 2021

Il faut cultiver nos océans…

Par Michel Driol

Alors qu’il pêche avec modération ce qui est nécessaire pour nourrir sa famille, Petit Pêcheur délivre le Roi-des-crabes, qui lui accorde un vœu. Sur l’insistance de ses enfants, qui en veulent toujours plus, il demande à pêcher 100 poissons par lancer. Avec l’argent gagné, il achète un bateau plus grand, devient exportateur de conserves de poissons, jusqu’au jour où il ne pêche plus aucun poisson et doit partir plus loin. A la suite d’une tempête, toute la famille se retrouve sur une ile, où elle rencontre d’autres pêcheurs qui prennent soin du fond de l’océan, font attention à leurs prises et leur offrent quelques algues et quelques couples de poissons pour repeupler leur coin d’océan…

Comment produire ? Comment consommer ? Voilà les importantes questions que soulève ce conte philosophique de Suzy Vergez, sans manichéisme. La mécanique est lancée par deux facteurs. D’un côté, l’envie d’avoir toujours plus, incarnée ici, c’est original, par les enfants, qui n’ont pas le rôle de sauveurs qu’ils jouent souvent dans ce type de conte, mais déclenchent, par leurs désirs incontrôlés et incontrôlables, la catastrophe. De l’autre, l’appât du gain, qui pousse le père à passer outre l’avertissement du Roi-des-crabes (pas plus de 100 poissons) et, dans une logique très capitaliste, le conduit à industrialiser son activité sans prendre garde aux ressources limitées de la planète. Face à cette démesure, les éléments naturels deviennent des personnages du livre : les crevettes et oiseaux jouent le rôle du chœur antique, et commentent, avec inquiétude, les événements. Les crabes ont un roi, et se coalisent contre Petit Pêcheur. L’océan lui-même déclenche une tempête. Cette personnification, propre au genre du conte dans lequel s’inscrit cet album, introduit à un imaginaire riche, mais, en même temps, correspond tout à fait au propos tenu : la nature est vivante et doit être respectée et préservée si l’on veut y survivre. Plein d’optimisme, l’album propose une solution aux dérèglements causés par Petit Pêcheur : cela passe par l’entraide et le respect de la nature, afin de préserver et faire prospérer les ressources naturelles.

Cette fable laisse le lecteur conclure de lui-même, choisir entre différents comportements dont les uns sont mortifères pour la planète : elle ne se veut ni moralisatrice, ni édifiante. Les personnages y sont humains, tout simplement, avec leurs désirs et leurs passions. Il leur faut encore apprendre à dépasser leurs envies immédiates pour rester raisonnables, penser au futur et le préserver. C’est une belle leçon d’écologie politique que donne l’album, à travers un beau conte que les illustrations situent en orient. Il faut souligner la qualité du travail graphique de l’autrice qui utilise différentes techniques, tampons, encre, sans doute papiers découpés, afin de composer un spectacle pour les yeux de toute beauté et particulièrement animé.

Un bel album, particulièrement bien écrit et bien illustré, pour réfléchir ensemble à notre lien avec notre terre nourricière, à travers l’exemple de la pêche.

Au pays des loups qui chantent

Au pays des loups qui chantent
Mickaël El Fathi / Odile Santi
Editions Courtes et Longues 2021

Dans les steppes de l’Asie Centrale

Par Michel Driol

C’est l’histoire d’un face à face entre l’homme et le loup, dans des steppes qu’on dirait mongoles, au milieu de l’immensité. C’est leur chant à deux voix que conte cet album, fait de rencontres, de naissances, et de saisons qui passent.

Entre poème et documentaire, ce magnifique album célèbre l’union de l’homme et de la nature. Les illustrations, en pleine page, d’Odile Santi, rendent compte d’un univers de steppe dans lequel l’homme n’est qu’un point, isolé, mais aussi magnifient, par des gros plans, l’homme et le loup. Elles sont à la fois très réalistes dans leur évocation précise de l’Asie, des costumes, des instruments de musique, ou encore de la fourrure du loup, mais aussi, par leurs couleurs, leur composition, elles ouvrent à un autre univers, qui peut s’avérer menaçant ou, au contraire, plein de paix et d’harmonie.

Le texte n’envahit pas l’image. Il se veut discret, presque minimaliste, souvent réduit à des groupes nominaux, afin de laisser une part importante à l’imaginaire du lecteur. Il évoque les liens entre l’homme et le loup, les similitudes entre les deux, l’amour qui les unit, même si parfois, comme les amoureux, ils se disputent. Le loup devient donc personnage à part entière de cette histoire, reflet de l’homme, possédant comme lui le chant et le sens de la famille. Tous deux sont de passage sur un territoire immense, où ils savent pourtant se retrouver tout en gardant leur liberté. A la fois proches et lointains, ils se guettent, ils se cherchent, et, d’une certaine façon, ils se respectent.

Un superbe album pour contempler la nature, les animaux, l’homme, les paysages, mais aussi pour revoir l’image du loup, bien loin de ce qu’il devient parfois en littérature jeunesse : un animal plus proche de l’homme qu’on ne le pense.

L’Anti-magicien, t. 6 : Hors la loi

L’Anti-magicien, t. 6 : Hors la loi
Sébastien de Castel
Gallimard jeunesse, 2021

Le Bateleur et le mage

Par Anne-Marie Mercier

Voilà le dernier épisode de l’aventure au long cours qui voit un jeune homme, fils ainé d’une longue lignée de mages puissants, se détourner de la magie pour utiliser des armes tout aussi puissantes contre toute attente : l’art de la persuasion, l’observation, le bluff, la dissimulation, et quelques prouesses de rapidité et de précision. Ses armes sont des cartes et des pièces, parfois des dés, attributs de bateleur. Mais l’arme majeure de Kelen c’est son humanité et sa capacité à se faire des amis qui seront autant d’alliés, notamment dans la bataille générale qui clôt la saga, magnifique final qui réunit des personnages vus dans les tomes précédents, jusqu’à la grand-mère responsable de la malédiction qui le touche, morte depuis bien longtemps.
Au passage, on aura découvert des civilisations qui luttent les unes contre les autres, un empire théocratique fanatique qui s’interroge sur la nature de Dieu avant de fondre sur les impies, des vagabonds, des marchands, une reine enfant…
Cette fin met un point final à l’aventure principale, mais pas au destin du héros, qui reste ouvert. Elle révèle les manœuvres qui ont abouti au conflit général qui menaçait le continent et désigne le coupable (dont on taira le nom).
Kelen, enfant désespéré de ne pas être à la hauteur malgré son application, adolescent en révolte contre toute sa famille et même contre tout son peuple, s’affirme ici (enfin !) comme un adulte qui refuse d’être manipulé plus longtemps.
Très belle fin pour une belle série pleine de rebondissements, drôle (souvent grâce à l’ami de Kelen, le chacureuil, qui jusqu’au bout  tient bien son rôle de voyou sympathique et efficace), intelligente, et invitant les lecteurs à choisir autant que possible « la voie de l’eau » plutôt que « la voie de l’orage » et la belle philosophie de Furia Perfax, personnage magnifique, qui aura initié Kelen à son chemin fait de subtilité et d’intelligence, de courage, d’adresse et de force.

 

 

 

Comment chasser les zombis de mon lit ?

Comment chasser les zombis de mon lit ?
Béatrice Fontanel – Loïc Froissart
Seuil Jeunesse 2021

Méfiez-vous des écrans !

Par Michel Driol

Le narrateur vit seul avec sa mère depuis le divorce de ses parents. Lorsqu’il récupère une télé pour la mettre dans sa chambre,  il y passe toutes ses soirées, devient accro aux jeux, aux émissions de télé-réalité et aux films. Par ailleurs, il adore les jeux vidéos… Jusqu’au jour où ses parents s’aperçoivent qu’il a décidé de passer une nuit avec un copain dans un club de jeux en ligne, et jusqu’au jour où une panne de courant lui permet de découvrir autre chose que les écrans.

Béatrice Fontanel propose ici un texte plein d’humour sur les dangers des écrans pour les jeunes enfants. L’humour vient pour partie du traitement du lexique : émissions et marques de produits alimentaires prennent des noms légèrement transformés, mais tellement plus évocateurs ! Il vient aussi de la position du narrateur, à la fois conscient de certaines choses (la dépression de sa mère, infirmière, depuis le divorce, ses rapports complexes à la nourriture), et complètement inconscient du danger que lui font courir les écrans et de ce qu’ils véhiculent. Tout est raconté à hauteur d’enfant, avec une certaine naïveté et des notations amusantes relatives aux rapports avec le collège, avec les camarades de classe et avec les adultes. Les illustrations, très colorées, ont aussi quelques traits naïfs et enfantins qui s’accordent parfaitement avec l’esprit du texte.

Sans moraliser, sans culpabiliser non plus les parents, ce petit roman aborde l’un des problèmes des enfants et jeunes ados d’aujourd’hui dans leurs rapports aux écrans, et propose des solutions. Reste à chacun à trouver le déclic pour les mettre en œuvre  en fonction de sa propre sensibilité pour aller sainement vers les autres.

Souvenirs de Marnie

Souvenirs de Marnie
Joan G. Robinson
Traduit (anglais) par Patricia Barbe-Girault
Monsieur Toussaint Louverture, 2021

Mémoire vive

Par Anne-Marie Mercier

Ce  roman célèbre dans le domaine anglais, paru en 1967 mais inédit jusque-là en français, est connu néanmoins du public français grâce à l’adaptation réalisée en 2014 par le Studio Ghibli. C’est, dit-on, un des livres favoris de Hayao Miyazaki. Rien d’étonnant à cela, à condition de lire le roman jusqu’au bout : la première partie, très classique, semble ne pas correspondre à l’atmosphère étrange et teintée de fantastique de ses films. Mais la seconde, la seconde… tient bien des promesses. C’est aussi un livre impossible à résumer car on risquerait de dévoiler tous ses aspects qui ne se montrent que les uns après les autres.
Au début, Anne, orpheline placée dans une famille d’accueil, se sent abandonnée par ceux qui sont morts en la laissant seule (ses parents, dans un accident de voiture, puis sa grand-mère qui l’avait recueillie) et se sent un peu responsable de cet abandon : autant dire que du côté de la confiance et de l’estime de soi elle est mal dotée. Elle est aussi incapable de voir les signes d’amour de sa famille d’accueil, s’obstinant dans l’idée que celle-ci s’occupe d’elle contre un salaire, donc uniquement par intérêt.
Elle passe quelques semaines chez un couple amie de cette famille, dans une maison située vers les dunes et les plages. Les paysages, la solitude, les légendes l’attirent, jusqu’au jour où une grande maison qu’elle croyait abandonnée s’anime et que surgit une petite fille de son âge, Marnie… Marnie apparait et disparait, fait des choses étranges, a des peurs étranges… Petite fille réelle, amie imaginaire? Est-elle folle ou née de la folie d’Anne ? on ne le saura que peu à peu, chaque mystère dévoilé en révélant d’autres. C’est un livre magnifique et sensible.
Marnie, sous toutes ses facettes est un personnage que l’on n’oublie pas et qui donne envie d’aller rêver vers les dunes aux lecteurs de tous âges.

La petite voix de la ficelle

La petite voix de la ficelle
Thierry Cazals / Joanna Boillat
Motus 2021

Lettres à un jeune poète

Par Michel Driol

La ficelle dont il est question dans le titre, c’est celle qui relie les deux pots de yaourt avec lesquels les enfants faisaient des téléphones pour se parler. Le font-ils toujours à l’heure des téléphones sans fil ?

Entre le premier poème, où un enfant téléphone à la terre, et le dernier, où l’on entend, à travers le pot de yaourt, venue d’une autre planète, la voix du frère, le recueil développe un véritable art poétique placé sous le signe de la communication, et prenant comme postulat la facilité de l’écriture d’un poème. Il développe une série de conseils pour mettre en éveil tous ses sens : la vue, le toucher, l’ouïe, le gout, l’odorat. Il s’agit de capter des sensations à la fois quotidiennes et minuscules pour leur donner ou redonner une valeur : gout des figues, chat qui s’étire, porte de grange qui grince, et enfin de s’oublier soi-même pour devenir ces choses-là. Ces différentes sources d’inspiration évoquées en quelques mots (il y a là comme une esthétique de la poésie japonaise) s’entrecroisent avec d’autres poèmes consacrés au langage, aux phrases et aux mots, c’est-à-dire au matériau même de l’écriture. Ce matériau qu’il convient à la fois d’oublier pour se laisser envahir par les sensations, mais qu’il convient aussi de recueillir dans la corbeille des mots oubliés, jusqu’au point, peut-être, où les mots se confondent avec les choses elles-mêmes, comme les mots rouges des antennes de crevette, ou les syllabes laissées par les pattes des moineaux sur la neige.

Entre les sensations, les choses et le poème, il y a l’espace et le temps du travail poétique, travail fait de patience, d’attente, de polissage des mots, de multiples brouillons et confettis de pages, mais aussi de sommeil sur l’échiquier ou de jets de noyaux de cerise… Thierry Cazals ne cherche donc pas à simplifier ce qu’est le travail du poète, ni à le réduire à une fabrique mécanique ou à une série d’exercices pratiques. Il le décrit comme étant accessible à tous – aux enfants en particulier à qui il s’adresse – mais en illustre de nombreux paradoxes, comme cette tension entre la disponibilité au monde et le travail patient des mots, travail dont on ne saurait plus dire quand il a commencé, ni qui en est le maitre, le poème ou l’auteur. Tout ceci est écrit dans une langue poétique extrêmement épurée et limpide, pourtant faite de métaphores et de comparaisons,  d’injonctions et de conseils que l’on a envie de suivre. Les illustrations de Joanna Boillat, du noir et blanc rehaussé de taches de couleurs, donnent à voir un monde magique, dans lequel des arbres prennent racine dans les livres, les enfants jouent et rêvent…

Sous un titre empreint de modestie, La petite voix de la ficelle est un art poétique dont la simplicité de l’écriture va de pair avec la complexité du propos tenu.

Jabari plonge

Jabari plonge
Gaia Cornwall
d’eux 2020

Le grand saut

Par Michel Driol

Se rendant à la piscine avec son papa et sa petite sœur, Jabari déclare qu’il va sauter du plongeoir… Mais, au pied de celui-ci, Jabari est impressionné par la hauteur. Il hésite. Mais finalement, grâce aux conseils patients de son père et à sa détermination, il parvient à sauter.

Grandir, c’est oser, surmonter ses peurs, trouver le courage d’aller plus loin, ou plus haut, et éprouver ensuite de nouveaux plaisirs.  Voilà ce dont parle cet album à travers une histoire simple et accessible à tous qui montre comment l’accompagnement parental est indispensable pour donner confiance aux enfants. Les illustrations – en partie à base de papiers journaux découpés pour figurer les immeubles et le décor urbain qui entourent la piscine – accompagnent Jabari de façon très cinématographique : plans larges, gros plans, plongées… et le montrent à la fois confronté aux barreaux de l’échelle, au plongeoir, mais aussi inséré dans la ville et dans sa famille. Ainsi Jabari est montré à la fois comme un individu qui doit accomplir quelque chose seul, mais aussi comme membre d’une famille, d’une communauté qui est là autour de lui. Après les doutes, les hésitations, c’est la joie qui se lit sur tous les visages, et l’élan vers du nouveau.

Cet album d’une autrice américaine peu connue en France, Gaia Cornwall, avec ses peaux brun chaud, son eau fraiche et bleue, présente une histoire stimulante et festive qui est un véritable rite de passage.