La Tête à la dispute

La Tête à la dispute
Emile Jadoul, Catherine Pineur
Ecole des Loisirs (Pastel), 2011

 Une histoire d’amitié enfantine

par Sophie Genin

9782211204132.gifUn moment important de la vie de tout enfant est raconté par Emile Jadoul qui excelle décidément dans cet exercice ! En effet, il dépeint avec réalisme, sans oublier la pointe d’humour permettant la distance nécessaire, une dispute entre une petite poule et une jeune cane. Le traitement délicat de l’histoire se retrouve dans les illustrations de Catherine Pineur, tout en flous colorés et visages très expressifs des protagonistes ailées. L’héroïne livre ses pensées avec l’exagération propre à l’enfance et l’écriture en « je » facilite l’identification du jeune lecteur connaissant sa première dispute. Cette fable se termine heureusement très bien : vous pouvez donc la mettre entre les mains de tous les querelleurs de votre entourage !

L’Une danse, l’autre pas

L’Une danse, l’autre pas
Geneviève Casterman
Ecole des loisirs (Pastel), 2011

 Poésie et humanité réunies

par Sophie Genin

9782211203012.gifLe titre poétique -référence au film d’Agnès Varda, L’Une chante, l’autre pas, traitant du droit des femmes et du féminisme à travers le destin très différent de deux amies – donne le ton de cette fable philosophique délicate.
Rose et Line, oiselles jumelles partagent tout dans la prime enfance mais sont fondamentalement différentes.
Le trait des dessins représente avec pudeur et émotion des oiseaux blancs aux pattes jaunes et au bec orange, les détails les humanisant pour rendre l’histoire accessible à tous. L’identification est immédiate car, grâce à la gémellité, chacun peut s’identifier à l’une ou l’autre soeur : l’une est « bougeon » et rêve de parcourir le monde, l’autre, plus sédentaire, a un tempérament d’artiste et recueillera les oisillons tombés du nid.
Toutes deux auront besoin de se détacher l’une de l’autre, de s’émanciper, afin de mieux se retrouver. La fin reste ouverte, chacun pouvant interpréter le destin des soeurs. Une des lectures, dans la lignée de Auprès de mon arbre de Brassens, pourrait être la renaissance de celle partie puis revenue, celle partie chercher ailleurs ce qu’elle retrouve chez elle, avec ses racines…

Quand j’étais petit

Quand j’étais petit
Mario Ramos

L’école des Loisirs (Pastel), 2011 (réédition, première édition 1997)

Un album sans texte à portée philosophique

par Sophie Genin

9782211043229.gif Sur la quatrième de couverture de cet album animé qui ne paie pas de mine au premier abord, on trouve une citation de George Bernard Shaw (écrivain irlandais ayant obtenu le prix Nobel de Littérature en 1925) :

« Beaucoup de gens ne sont jamais jeunes ; quelques personnes ne sont jamais vieilles ».

En effet, chaque double page de cet album sans texte s’éclaire à la lumière de ces mots : sous l’animal adulte (toujours humanisé), on découvre l’enfant qu’il a été : la maman chat à la fenêtre qui ne voit pas les souris les chassait petite, le lion sans abri qui fait la manche se déguisait en roi, le rhinocéros bougon qui part au travail en costume s’asseyait dans l’herbe et jouait avec les petits oiseaux… Ils ont tous changé, et pas forcément en bien, sauf la girafe, déjà curieuse petite et l’éléphant artiste de la couverture, comme un double de Mario Ramos (qui semble dire : « quand j’étais petit » !). Petit, l’éléphant peignait déjà… sur les murs !
Ce bel album, simple et pudique, est à mettre entre toutes les mains, des petits mais surtout des grands, histoire de se poser quelques questions sur l’éducation, l’avenir, l’évolution des rêves d’enfance, ce temps de latence où tout était possible, avec un peu de nostalgie ? oui, aussi !

La Pêche à la lune

La Pêche à la lune
Claude K. Dubois

Ecole des loisirs (Pastel), 2011

Une transmission poétique

par Sophie Genin

Claude K. Dubois, famille, grand-père, Sophie GeninMomo passe une mauvaise journée, mais alors vraiment mauvaise : il renverse son bol de chocolat, ses copains sont partis sans lui et son doudou est dans la machine à laver ! Heureusement, son papy arrive et l’emmène avec lui à la pêche à… la lune !

L’univers de Claude K. Dubois, auteur qui offre un regard poétique sur le quotidien, fonctionne à merveille dans ce petit album tout simple, nostalgique de belles relations inter-générationnelles riches. Il nous emmène avec lui, tout doucement mais sûrement, pour décrocher la lune ! La dédicace, « à mon père », finit de nous convaincre, s’il en était besoin, que cet ouvrage en forme d’hommage nous concerne tous, petits et grands.

Faites la queue !

Faites la queue !
Tomoko Ohmura, traduction Jean-Christian Bouvier
Ecole des Loisirs, 2011

… ou comment apprendre la patience par l’humour !

par Sophie Genin

humour,patience,ohmura,sophie genin Dès la page de titre, le lecteur est prévenu : « En rang sur une file et dans l’ordre, s’il vous plaît » annonce un grand panneau de bois au centre de la page. Une hirondelle ajoute : « Bienvenue ! Les derniers arrivés prennent la queue ici ». Et le narrateur, comme s’il prêtait sa voix au lecteur, s’écrie : « Tiens, mais qu’est-ce qu’ils attendent tous ? Allons voir… ». A cet instant, le regard peut enfin se poser sur une grenouille portant un mystérieux « n°50 ».

Au fil des pages, cinquante animaux, du plus petit au plus grand, tous numérotés dans l’ordre décroissant, font des commentaires qui ne peuvent que titiller la curiosité grandissante du lecteur. Ce dernier ne saura pas de quoi il s’agit avant la surprise finale, de taille ! 

Cet album fonctionne à merveille et c’est avec une rapidité croissante qu’on finit par tourner les pages ! Cet éloge de la patience dans notre monde d’hyper-concommation tombe à pic pour qui voudrait (re)découvrir la jubilation de la patience. La récompense à la clef est à la hauteur ! Toujours pas l’album entre les mains, petits impatients que vous êtes ? Foncez !

La Nuit de Valentine

La Nuit de Valentine
Hélène Vignal et Isabelle Carly
Le Rouergue, 2011

Grandir et s’épanouir quand on est introverti

par Sophie Genin

9782812602016.gifValentine est une petit fille sage, très sage, trop sage. Au fur et à mesure d’un texte énigmatique qui présente une héroïne très timide qui aurait envie mais attend que le monde vienne la chercher, on sent croître le malaise jusqu’à la fameuse nuit qui donne son titre à l’album. Une nuit où tout devient possible pour Valentine, sa nuit !

Le texte, volontairement elliptique sur les causes psychologiques de l’attitude de l’enfant, est tiré vers le rêve par des illustrations oniriques mêlant dessin et collages colorés. L’univers visuel semble être une voie/x différente proposée au lecteur qui peut, à sa guise, remplir les blancs de l’histoire. Cet album particulier, comme souvent au Rouergue, résonnera différemment chez les lecteurs car il faut, pour l’apprécier, accepter de suivre l’auteur et l’illustratrice sur un chemin mystérieux, voire inquiétant parfois… Il faut accepter aussi de rester avec de nombreuses questions sans réponses à la fin de la lecture…

Un escargot à la porte

Un Escargot à la porte
Lo Gruhier
Ecole des Loisirs, 2011

 « J’m’ennuie, j’sais pas quoi faire ! »

par Sophie Genin

ennui, escargot, enfance, Lo Gruhier, Sophie GeninLe héros anthropomorphe de Lo Gruhier, nouvelle plume et illustratrice prometteuse, devrait rapidement rejoindre ses condisciples de L’Ecole des Loisirs. En effet, tous les éléments constitutifs de ce petit album, qui ne paie pas de mine, le prouvent : le petit cochon au mauvais caractère qui ronchonne rappelle nombre de jeunes enfants qui se reconnaîtront et fera sourire beaucoup de parents ! De plus, l’éloge de l’ennui et de la lenteur comme moteur créatif fonctionne à merveille lorsque Ptit Cochon découvre un escargot devant chez lui. L’investigation concernant sa provenance, en suivant la trace de bave de son chemin, va emmener le jeune héros très loin.

Le dessin épuré, sans décor ou presque, laisse la part belle à l’imagination du jeune lecteur. Nous aurons droit à toutes les hypothèses, branchés en direct sur les pensées, nombreuses et désorganisées, du petit enquêteur. Il finira par découvrir autre chose que le but de sa quête : l’objet qui lui manquait tant au début de l’histoire pour pouvoir s’amuser tout seul ! Et la boucle de cette fable intimiste et universelle est bouclée, même si la chute laisse deviner que Ptit Cochon n’est pas au bout de ses aventures solitaires au fond du jardin !

Brosse-toi le bec Cocopoulette !

Brosse-toi le bec Cocopoulette !
Clair Arthur et Vincent Mathy

Flammarion-Père Castor (Les p’tits albums), 2011

Brosse-toi les dents, qu’on en finisse !

par Sophie Genin

poule,hygiène dentaire,Père Castor,sophie geninLes poules ont toujours beaucoup inspiré la littérature de jeunesse mais le résultat n’est pas toujours heureux, comme dans cet album qui accumule tant les jeux de mots sur l’univers des gallinacés qu’ils en deviennent indigestes (voir par exemple le becquiste pour le dentiste, le becquifrice, un bouche-trou de bec…).

L’objectif didactique qui vise, vous l’aurez compris en lisant le titre, le brossage régulier des dents du lecteur fait flop alors que l’univers coloré et ludique proposé par l’illustrateur et l’auteur aurait pu être entraînant…

Si les poules et les jeux de mots vous attire, allez plutôt voir du côté de la série des « p’tites poules » par Christian Jolibois et Christian Heinrich, vous ne serez pas déçus !

Amos et les gouttes de pluie/Amos et les pissenlits

Amos et les gouttes de pluie/Amos et les pissenlits
Anne Cortey et Janik Coat

Autrement Jeunesse, 2011

Quand la poésie et l’absurde enfantent un héros attachant

par Sophie Genin

poésie,absurde,sophie geninpoésie,absurde,sophie geninLes deux petits albums, publiés en même temps chez Autrement Jeunesse, sont deux petits bijoux de simplicité et d’émotions.
En effet, ils mettent en scène une espèce de koala bicolore (bleu et rouge) aux yeux jaunes. Sur les couvertures, on le découvre sous son parapluie ou en train de souffler sur des fleurs de pissenlits qui s’envolent alors qu’il est assis sur une oie.
Au fil des images, présentées sous forme d’accordéon, on suit les aventures, toute simples, de ce petit personnage, auquel un jeune enfant s’idenfiera facilement, qui découvre le monde : la pluie et les fleurs de pissenlits pour l’instant, en espérant que d’autres suivront !
Ce « koala » tient un peu du personnage de La Linea, célèbre dessin animé des années 70, pour l’absurde des chutes. Celle de l’opus sur la pluie fait même penser à un tableau de Magritte intitulé « Golconde », mettant en scène une pluie d’hommes coiffés de chapeau melon. Est-ce à dire que ces petits livres ont une portée philosophique, oui, sûrement ! Et, en plus, on trouve même une référence aux oies de Nils olgersson, c’est dire la richesse de ces albums ! N’attendez plus, courrez découvrir ce nouveau héros !

1001 choses à trouver

1001 choses à trouver… dans la mer/châteaux et chevaliers
Katie Daynes/Hazel Maskell, illustrations : Teri Gower
Usborne, 2011

Un goût de déjà vu

par Sophie Genin

9781409528890.gif9781409527442.gif La série « chercher Charlie » dont un best of est sorti cette année a fait des émules mais le résultat n’est pas à la hauteur… Sous couvert de faire découvrir, parmi de nombreux autres titres encore plus stéréotypés, les fonds marins ou la vie quotidienne au Moyen-Age, les auteurs proposent de trouver des choses, certes nombreuses, mais qui laissent parfois perplexes, comme des pêcheurs ou des moutons noirs dans « Châteaux et chevaliers » et des sandwichs ou des tee-shirts blancs dans « la mer » ! On peut passer un moment agréable à chercher les détails avec son enfant mais mieux vaut retrouver Charlie, qui a au moins le mérite d’avoir été le premier !