Le Pilote et le Petit Prince. La vie d’Antoine de Saint-Exupéry

Le Pilote et le Petit Prince. La vie d’Antoine de Saint-Exupéry
Peter Sís
Grasset Jeunesse, 2014

Cartographie d’une vie : temps et espace

Par Anne-Marie Mercier

Les albums de Ppilote_petit_prince_couv-7f10aeter Sís s’apparentent parfois à des cartes, des plans représentant des espaces dans lesquels le lecteur erre, se perd, ouvre des portes ; ses histoires sont souvent des labyrinthes. Ici, le lecteur prend de la hauteur : les paysages sont ouverts, comme le désert de sable du Petit Prince ou comme le ciel bleu dans lequel le pilote disparaît. Le lecteur prend son envol avec le pilote et voit le monde d’en haut.

Le temps lui-même se déplie : la vie de Saint-Exupéry est représentée en séries de petites vignettes rondes réparties sur la double page : anecdotes personnelles, ou événements inscrits dans l’histoire. Peter Sís illustre – à tous les sens du terme – ainsi de quoi est fait un récit biographgaliléesisique et invente un autre dispositif que celui , tout aussi superbe, qu’il avait inventé pour sa vie de Galilée (Le Messager des étoiles, Grasset, 1996) : une collection de moments (dont certains sont des « biographèmes » au sens où l’entendait Barthes) que l’on tente d’unir avec une toile de fond qui donne une impression de cohérence et de continuité.

Ici, la toile, le fond, c’est la couleur (merveilleux bleus, jaunes, ocres ; pages imitant les teintes des atlas ; superbe évocation sanglante du début de la guerre…) il faudrait citer toutes les pages : cet album est une merveille de bout en bout. La toile de fond est aussi l’Histoire, tant personnelle que collective : cartes et événement tissent une trame dans laquelle s’inscrit le pilote : histoire de l’aviation tout d’abord, parcours d’un homme qui aborde toutes les faces d’un métier qui est aussi une passion. Parcours du monde et des progrès des communications, de l’aéropostale. Parcours de pays en guerre et d’un espace qui se rétrécit et devient un piège tout en devenant plus accessible.

La vie personnelle de Saint-Exupéry apparaît discrètement et l’écriture du Petit Prince est inscrite dans un temps de désarroi. Que de deuils dans cette vie, que de dangers aussi : le nombre d’accidents est impressionnant, et parmi eux celui qui le fait errer avec son mécanicien dans le désert pendant plusieurs jours. L’image du Petit Prince est forte, bien qu’il ne soit évoqué qu’au moment de sa création et de sa publication, aux Etats Unis en 1943 : silhouette laissant flotter une écharpe ou une cravate, enfant aux grands yeux et aux mèches folles, il est semé un peu partout ; il a les traits de l’auteur enfant et réapparaît dans sa figure d’adulte, il est derrière lui dans l’avion sur la couverture comme dans les mots du titre, il est comme une arrière pensée permanente, celle que le lecteur a en lisant cette vie d’homme habitée par l’esprit d’enfance.

Signalons la rLes_trois_cles_d_or_de_Pragueeparution chez Grasset (merci Grasset!) du merveilleux album, devenu un classique, Les trois clefs d’or de Prague(1994-Grasset 1995), mention spéciale du Salon de Montreuil.

Notice à venir : Le Petit Principe (Eva Almassy, 2014)…

La cité, tomes 2 à 5

La cité, tomes 2 à 5
Karim Ressouni-Demigneux

Rue du Monde, 2014

Ce n’était pas un livre, Jonathan. C’était un monde.

Par Christine Moulin

tome 5 cité[Rappel : chronique du tome 1].

Voilà, c’est fini. J’aimerais, bien sûr, à l’instar des joueurs de « La Cité » qui, à peine sortis du jeu, se précipitent sur les forums pour en parler, prolonger la magie et l’illusion, en commentant, en revenant en arrière, en vérifiant. Mais comment le faire sans « spoiler », comme on dit maintenant?

Essayons quand même. Sachez d’abord que ceux qui ont tremblé tout au long des tomes de cette pentalogie en priant pour que l’auteur ne se prenne pas les pieds dans le tapis (on en a vu, et des plus grands, tel Herbert, se perdre dans  les méandres qu’ils avaient eux-mêmes créés) peuvent être rassurés. Les explications arrivent, satisfaisantes et surprenantes à souhait (ah, certaines phrases coups de poing à la fin de certains chapitres…)

Mais si Karim Ressouni-Demigneux n’avait écrit qu’un scénario bien ficelé, cela n’expliquerait guère la fascination que peuvent exercer ses cinq livres. Je suis sûre de ne pas arriver à la mettre en mots, mais de nouveau, essayons quand même.

Il y a d’abord l’extrême sophistication de l’entrecroisement des thèmes. Pour qui aime les jeux sur le même et l’autre, ces romans sont de vrais bonheurs. Nous suggérant lui-même quelques clés de lecture, l’auteur multiplie, dans le monde virtuel où évoluent ses personnages, des motifs qui nous alertent, nous encouragent à nous interroger: dans un univers qui est lui-même le double du nôtre, il parsème le parcours labyrinthique de ses héros de représentations, pour nous perdre, finalement, dans un jeu de reflets. On ne compte plus les miroirs, les photos, les enregistrements vidéo, les écrans, les tableaux, les commentaires de commentaires, les mises en abyme de toutes sortes, sans compter les jumeaux, innombrables. Les cinq livres deviennent alors semblables aux boîtes noires qu’utilise Little King, un magicien admiré par Thomas: ils finissent par nous enjoindre de nous connaître nous-mêmes et d’affronter nos peurs cachées. Le choix est vaste: ce peut être le deuil, l’abandon, la quête d’identité, la trahison, le dégoût de soi, les blessures d’amour ou d’amitié, tout aussi cruelles, la lâcheté, et puis, évidemment, le temps, le temps compté, le temps qui manque (comme elle est bien rendue, l’angoisse du joueur, qui doit, quand même, se résoudre à rejoindre la réalité mais qui voudrait encore régler ce problème, aller voir si…, vérifier que…) mais aussi le temps qu’on perd, le temps perdu, le temps retrouvé. La liste est longue, à la mesure de la richesse des situations auxquelles sont confrontés les héros. Cependant, la cohérence de l’édifice est telle que jamais on n’a l’impression que les questions soulevées, souvent ancrées dans les interrogations d’aujourd’hui (l’affaire Snowden, par exemple), apparaissent artificiellement: elles participent à la logique de l’ensemble et sont prises dans un réseau qui en justifie l’émergence.

Mais tout cela pourrait se réduire à un simple jeu intellectuel (ce qui est la tentation pour certains joueurs de la Cité). Il n’en est rien car nous nous attachons progressivement aux personnages, qui assument à tour de rôle la narration. Ce procédé autorise, bien sûr, comme dans tout roman choral, un jeu sur les points de vue mais celui-ci est doublé par les caractéristiques des règles de la Cité, qui octroient des pouvoirs particuliers aux joueurs et leur permettent de découvrir, sous certaines conditions, des éléments qu’ils n’avaient pas perçus au premier abord (arrrgh!… ne pas spoiler!). Tout cela oblige le lecteur à sans cesse douter et changer d’avis sur les héros, aussi opaques et changeants que n’importe qui dans la vraie vie (non, mais la vraie, pas la vraie qui est décrite dans le livre…). Ils en deviennent humains, proches, à l’instar de leurs avatars dans la Cité, ce qui nous amène à nous demander : qu’est-ce qui fait, vraiment, au fond, l’identité de quelqu’un ?

Dans ce qui fonde la fascination exercée par ces romans, il y a aussi le propos même, qui s’épaissit et s’éclaircit au fil des pages. Loin de vouer aux gémonies les jeux vidéo et Internet, l’auteur en fait éprouver les charmes (au sens magique du terme) et les potentialités. C’est une des forces de cette série, que l’on peut aussi interpréter (enfin, c’est ainsi que je l’ai lue) comme une déclaration d’amour à ce que peuvent apporter les univers virtuels: « […] la technologie informatique peut nous libérer, nous enrichir, nous cultiver. […] les jeux vidéo ont été le lieu de mon épanouissement. J’y ai découvert des plaisirs inouïs, des mondes nouveaux ». C’est donc aussi une dénonciation de ceux qui les dévoient mais sans manichéisme: accuser les marchands, ce serait simple et convenu. C’est plus compliqué, plus touchant, aussi.

Il y a enfin le jeu avec la littérature déjà là : Victor Hugo y tient une place de choix. Loin d’être réduit, comme souvent, à la figure de l’aïeul à barbe blanche promue par la Troisième République, il est évoqué par la présence permanente et discrète de la grande oubliée, Juliette Drouet, et par des extraits qui sortent des sentiers battus. Les mythes sont aussi convoqués: celui de Dédale et d’Icare, par exemple. Mais la culture « geek » est tout aussi bien représentée, ce qui donne raison, sans prêchi prêcha, à ceux qui refusent les frontières entre les différentes formes de culture: les Ombres rappellent les histoires de zombies, Wow est régulièrement évoqué, Le Seigneur des anneaux, etc. Toutes ces allusions réalisent finalement le rêve d’un des personnages (non, je ne peux pas vous dire qui c’est) : rapprocher, créer des communautés, des appartenances, sans exclure, favoriser les découvertes et le partage. « Internet, jeux, informatique, toute cette culture mérite que nous nous battions pour elle, car elle permet d’immenses choses » (tome 5, p.221).

Vous l’avez deviné : la complexité n’est pas complication. Le style reste simple mais exigeant. La lecture ressemble à ces pages blanches, que découvrent différents personnages dans plusieurs endroits de la Cité, pages où ils voient parfois apparaître des révélations qui s’effacent bien vite pour en laisser apparaître d’autres, tout aussi énigmatiques. Les joueurs passent leur temps à faire des recoupements, des rapprochements, des listes, des hypothèses, pour essayer de comprendre quel est le but du jeu auquel ils jouent: croyez-le si vous voulez mais je me suis surprise à faire la même chose, tout en lisant!  Karim Ressouni-Demigneux a en quelque sorte inventé, du moins me semble-t-il, une écriture adaptée à notre temps, ludique (mais on est loin des simples livres dont nous serions le héros) et réticulaire (ses effets d’annonce sont redoutables…), sans que pour autant elle se réduise à une simple tentative expérimentale: il s’agit bien d’éprouver les pouvoirs de la littérature, au service de ce qui a toujours été son fonds de commerce, si j’ose dire, les émotions et la quête de nous-mêmes. On comprend alors que la page finale ne pouvait être que ce qu’elle est.

Le lion des montagnes

Le Lion des montagnes
Julie Bonnie
illustrations Max de Radiguès
Editions du Rouergue (Zig, Zag), 2014

Quand la chèvre finit par miauler !

Par Chantal Magne-Ville

Un joli petit rLeliondesmontagnesécit plein de réalisme pour raconter le drame de chèvres attaquées par un fauve féroce. Eh oui ! Le lion des montagnes existe bel et bien dans les forêts de séquoia de Californie, non loin de Sacramento. Le jeune narrateur, dans une langue simple et vibrante, empreinte d’oralité, retranscrit la longue traque de ce prédateur, tout en plongeant le lecteur dans les multiples sensations éprouvées devant les beautés de la nature sauvage.Loin des bruits de la ville, la relation entre un père et son fils montre l’importance de la transmission des valeurs de respect, aussi bien de la vie que de la mort.

Un style léger et enfantin pour de véritables questions existentielles, si profondes qu’il vaut mieux les aborder en s’abandonnant à la fraîcheur de cet univers, souligné par des illustrations au trait épuré, redondantes avec le texte, mais qui renforcent encore l’humanité des personnages, d’autant plus que le récit est tiré de faits réels ! Une plongée dans les grands espaces américains pour apprendre à saisir la complexité de la nature.

L’Année du Mistouflon

L’Année du Mistouflon
Anne-Marie Chapouton

Flammarion, Castor poche (romans) 2014

La « Bête » de Lourmarin

Par Anne-Marie.Mercier

lAnnée du MistouflonParu en 1975, ce Mistouflon avait fait bien des heureux, tant la fantaisie accompagnait la peinture d’un village (Lourmarin dans le Lubéron), de son école, des enfants et de leur famille. Irrévérencieux, amateur de Picole (recette jointe dans le livre) et mangeur de tabac, le Mistouflon sème la panique, tantôt adoré, tantôt détesté par les habitants, jusqu’au jour où l’on découvre l’existence de la Mistouflette…

Ce grand classique des lectures de l’école primaire réparait après avoir une première parution en Castor poche en 1982. Les illustrations de Gérad Franquin sont… du Franquin : parfaites pour accompagner ce récit loufoque.

Quant au petit dossier ajouté au volume, s’il comporte quelques éléments intéressants, on conseille d’oublier les exercices de grammaire et d’orthographe, très opposés à l’esprit-misouflonesque !

Gladiateur, t. 2 (Duel à Rome)

Gladiateur, t. 2 (Duel à Rome)
Simon Scarrow
Traduction (anglais) par Julien Ramel (Londres, 2013 Gladiator : Street fighter)
Gallimard jeunesse, 2013

Pouvoir romain in vivo…

Par Chantal Magne-Ville

Gladiateur2Duel à Rome permet de retrouver, Marcus, jeune garçon de onze ans qui appartient depuis un an à l’école de gladiateurs de Porcino, car il a été réduit en esclavage comme sa mère, suite à l’assassinat de Titus qu’il considérait comme son père. Il a appris tardivement qu’il était en réalité le fils de Spartacus, mais il le cache, car ce serait signer son arrêt de mort puisque celui-ci était considéré comme l’ennemi public des romains. Marcus a le dessein de rencontrer Pompée pour qu’il l’aide à retrouver sa mère. Il a été remarqué par César, car il a sauvé la nièce de celui-ci, Portia d’une mort certaine. Cette dernière semble vouloir faire de Marcus son confident mais il reste sur ses gardes vu leur différence de condition. César veut que Marcus soit entraîné pour devenir le garde du corps de Portia, et la protéger dans ses déplacements dans le quartier de Subure: à Rome le port du glaive étant interdit, Marcus doit apprendre à manier la dague, le couteau de lancer, la fronde, les bolas et la canne et savoir combattre à mains nues. César veut surtout qu’il infiltre un des clans qui crée l’insécurité dans la ville.

Suivre les aventures de Marcus permet une véritable immersion dans le quotidien de Rome, de ses ruelles et de leurs odeurs, et la découverte des rapports de force et des intrigues politiques au sein du Forum. Marcus aide César à démasquer un traitre en la personne de Bibulus. César est dépeint comme implacable mais aussi fin stratège. Il défend un amendement pour faire justice aux soldats qui ont combattu pour Rome en leur donnant des terres.

Lors de l’enlèvement de Portia et des combats pour la délivrer, les comportements humains et la mansuétude sont valorisés par rapport à la barbarie ; la vivacité d’esprit et la détermination sont toujours privilégiées par rapport à la force brutale. Ainsi, Kasos, un ennemi que Marcus a épargné, l’aidera à son tour à échapper à ceux qui veulent le tuer.

Les scènes à l’école de gladiateurs soulignent l’importance de l’effort, d’un entraînement physique, intensif, régulier et fastidieux.

Le récit s’apparente parfois à un thriller quand le lecteur ressent de l’intérieur la précarité du statut d’esclave qui, d’un moment à l’autre, peut être valorisé ou menacé, loué ou exécuté. Marcus n’hésite pas à avouer qu’il a peur dans les combats difficiles ce qui le rend extrêmement humain.

Un récit haletant pétri de valeurs universelles qui n’ont rien de passéistes et que la vie actuelle questionne toujours.

 

 

L’île du temps perdu Silvana Gandolfi

L’île du temps perdu
Silvana Gandolfi
Traduit (italien) par Faustina Fiore
(Les Grandes Personnes), ‘2014

Le temps en conserve

Par Anne-Marie.Mercier

Où vont tous cesL’île du temps perdu objets perdus, ces souvenirs égarés, ces heures « perdues », car inutiles ? Silvana Gandolfi donne une belle réponse : sur l’île du temps perdu.

Deux enfants y échouent après s’être perdues lors d’une visite de classe dans une mine. Elles découvrent une île peuplée essentiellement d’enfants (on pense à Sa Majesté des mouches et on frémit, comme elles frémissent devant la bizarrerie de ces bandes et leurs façons). La suite est passionnante autant qu’originale.

On découvre peu à peu la spécificité de ce lieu, ses dangers, ses liens avec le monde actuel et la nécessité de savoir perdre son gandolfitempstemps… Belle leçon pour tous !

Ce livre est une réédition: il avait paru en 2004 dans la belle collection de romans en grands formats de Seuil jeunesse.

 

 

 

 

À Bord du bateau pirate

À Bord du bateau pirate
Jean-Michel Billioud et Ollivier Latyk

Gallimard Jeunesse (Le monde animé), 2014

C’est un fameux trois-mâts

Par Matthieu Freyheit

Le bateau aBorddubateaupiratepirate est devenu en peu de temps un classique des albums de jeunesse, sorte de sous-branche des albums consacrés plus généralement à la piraterie. De fait, à bord du bateau pirate, on trouve essentiellement…des pirates. L’idée n’est donc pas neuve, ni originale, mais ce volume a l’intérêt de se montrer plus précis et plus curieux d’un mode d’existence somme toute particulier, et dont nous ne savons pas tout. De l’embarquement à la capture par les soldats du roi, l’album revient sur les principaux épisodes traversés par le bateau pirate : l’enrôlement, la répartition des tâches, la position du capitaine, les escales, les abordages et les trésors remettent en perspective les étapes majeures d’un véritable roman de piraterie. L’aventure avant tout, donc, mais semée d’informations et d’anecdotes qui permettent à cet album de sortir un peu du lot.

Visuellement, le livre privilégie les tons simples qui ne mettent pas à mal la présentation des informations, tout en livrant des scènes animées et riches. Et comme toujours dans ces albums participatifs, le geste du lecteur est mis à contribution : des languettes à tirer, des éléments à soulever, des roulettes à tourner, faisant de chaque double-page un livre dans le livre. Une réussite, donc, qui n’hésite pas à mélanger avec intelligence l’enthousiasme de l’aventure et de la découverte à celui de la connaissance.

 

Charlotte et Mona

Charlotte et Mona
Florence Seyvos

L’école des loisirs, 2014

Petits aménagements

Par Anne-Marie.Mercier

Trois Charlotte et Monacourts récits, aux illustrations un peu désuètes mais d’une belle candeur enfantine, voilà le menu de ce petit livre qui propose les « aventures » de deux sœurs : l’installation de leurs chambre après un déménagement, un jeu autour de la radio, une peur… le quotidien devient source d’émerveillements – et d’ailleurs, merveille : les peluches sont vivantes parfois, et parlent !

Animorphs (vol. 5, Le Prédateur)

Animorphs (vol. 5, Le Prédateur)
K. A. Applegate

Traduit (américain) par Noël Chassériau
Gallimard Jeunesse (Grand Format), 2014

Noé dans l’espace

Par Matthieu Freyheit

CinquièAnimorphsvolme tome d’une série forte de quarante-huit épisodes, publiée au milieu des années 1990.

On ne peut que saluer la réédition par Gallimard de cette œuvre devenue un classique du genre en littérature de jeunesse, série-fleuve de la métamorphose. Ce n’est pas pour rien sans doute, au vu du succès actuel de la thématique, que la série Animorphs continue d’être lue. Mais le sujet ne fait pas tout : claire, efficace, l’écriture de Katherine Alice Applegate a surtout l’intelligence d’une certaine neutralité, évitant d’être trop strictement marquée par le style des années 1990. Et dans un domaine éditorial où ‘devenir classique’ est encore une notion à étudier, la pérennisation qu’assure cette réédition ne peut que nous intéresser.

Du côté de l’histoire, par conséquent, rien de tout-à-fait neuf : la guerre menée contre les répugnants Yirks bat son plein, et le lecteur est ici amené à partager les doutes qui habitent l’un des héros, Marco. Et, toujours, une belle suite de métamorphoses, ici singulièrement variées, jusqu’à souffler l’idée d’une arche parodique d’animaux pris au piège d’un vaisseau ennemi.

L’innocent de Palerme

L’innocent de Palerme
Silvana Gandolfi

Traduit (italien) par Faustina Fiore)
Gallimard (folio junior)/Les Grandes Personnes, 2014

Witness à Palerme

Par Anne-Marie.Mercier

C’est un innocentdepalerme2roman bien réaliste que Silvana Gandolfi a fait paraître chez les Grandes Personnes en 2011 ; il réparait en poche, après la consécration que lui donnée le prix Sorcières et son inscription sur la liste des lectures conseillées pour les collégiens par l’éducation nationale.

Deux histoires s’entremêlent dans la première moitié de l’ouvrage, dont on voit mal comment elles peuvent se rejoindre : celle de Santino, enfant unique palermitain, très fort en course à pied, dont les pinnocentdepalerme1arents tirent le diable par la queue, et celle de Lucio, adolescent de Livourne, qui fait du voilier et  vit seul avec sa mère et sa petite sœur. Les deux histoires se rejoignent vers la moitié de l’ouvrage, expliquant tous les non dits et plongeant le lecteur dans un récit angoissant (mais pas trop) où la mafia semble partout, en quête du témoin qu’est Santino.

Réalisme et fantastique se mêlent également en fin d’ouvrage, nous faisant renouer avec des thèmes chers à Silvana Gandolfi pour qui le réel a bien des strates.