Le dossier Artémis Fowl Le complexe d’Atlantis (Artémis Fowl, 7)

Le dossier Artémis Fowl
Le complexe d’Atlantis (Artémis Fowl, 7)

Eoin Colfer
traduit (anglais) par Julien Ramel
Gallimard (folio junior), 2011

Petit Vade-mecum Artémis

par Anne-Marie Mercier

Le dossier Artémis Fowl .gifCette édition en poche du volume publié en 2006 propose aux amateurs du héros de Eoin Colfer quelques éléments qui leur permettront de compléter la saga. On y trouve deux courts récits, « les FARfadets », qui retrace l’entrée de Holly dans les forces luttant contre les infractions au code de bonne conduite des êtres féeriques, et « le septième nain », qui retrace une aventure d’Artémis, voleur patenté. Ce volume propose également un alphabet gnomique, des interviews des différents personnages, un Quiz absurde, et  quelques autres renseignements fondamentaux comme les bulletins scolaires d’Artémis…

Le complexe d'atlantis (Artémis Fowl, 7).gif Peu auparavant est paru le septième tome de la série, dans lequel on retrouve le démoniaque Turnball et les ingrédients qui ont fait le succès de la série : suspense, inventivité et humour.  Le jeune héros irlandais met du désordre dans le monde de la féerie, comme d’habitude, mais surtout est lui-même en plein désordre, souffrant d’un syndrome qui produit des troubles obsessionnels, de la paranoïa, et un éclatement de la personnalité. Ce dernier point produit des situations cocasses : le double d’Artémis, Orion, est une sorte de Don Quichotte qui ne fait pas la différence entre la fiction et la « réalité ». Ce volume est annoncé comme l’avant-dernier de la série.

Cherub, vol. 1: Cent jours en enfer

Cherub, vol. 1: Cent jours en enfer
Robert Muchamore

Traduit (anglais) par Antoine Pinchot
Casterman, 2011

Petit manuel de machiavelisme pour les enfants

Par Anne-Marie Mercier

michael gerard bauer,moby dick,timidité,persécution,école,parole,éloquence,concours,cancer,castermanLe premier tome de la série « culte » de Cherub est publié en poche… Enfin, direz-vous ? Hélas, plutôt… Bien sûr, ce sont des romans d’action bien menés ; bien sûr le jeune héros, James, petit délinquant qui ne pense qu’à jouer à la PlayStation et à regarder la télé et qui est sauvé par l’ »organisation » Cherub peut séduire certains.

Mais l’école de Cherub ressemble beaucoup à un camp d’entraînement (le titre, « 100 jours en enfer », désigne le programme d’entraînement intensif des futurs agents-espions), la discipline est menée à coup de punitions humiliantes, l’enseignement présenté comme un enseignement d’élite pour une élite (10 élèves par classe).

Enfin, sur le terrain, les jeunes gens ont une activité d’espions : mensonge, dissimulation et trahison sont leur domaine. Le seul interdit (« ne pas nuire à des innocents ») est hardiment franchi au prétexte que « on ne fait pas d’omelettes sans casser des œufs ». La volonté d’entrer dans la complexité est intéressante, mais

Le succès de la série montre-t-il que le nouveau rêve des adolescents n’est plus d’être un hardi policier, ou sorcier, ou voleur, mais d’être un enfant soldat ? que l’école dont ils rêvent est un pensionnat-prison militaire ? ou bien est-ce juste pour se faire peur ?

Le prétexte est que ces héros eux aussi « sauvent le monde », mais au bénéfice de qui ? Dans ce premier volume c’est au bénéfice des compagnies pétrolières contre les hippies et les écologistes. Bien sûr, les uns agissent en toute légalité et les autres pas… mais si la littérature pour adolescents se met à donner la primauté au Droit contre la Justice, il y de quoi s’interroger.

Enfin, que je sache, les écologistes – fussent-ils terroristes (?) – n’ont jamais commis d’attentats sanglants. Que le livre fasse croire le contraire n’est pas innocent.

Quant à l’écriture, elle est d’une platitude sans nom.

Pour aller plus loin, lisez la chronique- coup de gueule parue sur le blog de Patrice Favaro.

Et lisez plutôt Grande école du mal et de la ruse de M. Walden (oui, les héros sont des affreux jojo délinquants, mais au moins c’est drôle) ou Jimmy Coates de Joe Craig, A comme Association de Bottero et L’Homme (surtout les deux premiers), éventuellement Spy High (série, pas excellente, mais moins inquiétante, pour ce que j’en ai vu). Et, pourquoi pas, les Langelot (Lieutenant X/ Vladimir Volkoff), romans d’espionnage pour la jeunesse bien conservateurs mais écrits avec style.

Des Pensées sans compter: philosophie en papillottes

Des Pensées sans compter
Frank Prévot, illustrations de Martin Jarrie

Editions l’édune (papillottes), 2011

éclats de philosophie

par Anne-Marie Mercier

Des pensées sans compter.jpgLes « pensées » de Franck Prévot ont ceci de commun avec celles de Pascal qu’elles sont fragmentaires, apparemment décousues, pleines de sagesse. Mais elles sont radicalement différentes dans la mesure où le jeu sur le langage prime. Jeux poétiques, calembours, mots d’enfant, rêveries sur les saisons, les humeurs, les émois :

– On sait que la chaleur vient du soleil. Mais le froid ? D’où vient-il, le froid d’hiver ?

– Plus tard, les minuscules deviennent-elles des majuscules?

– Prendre du recul m’aide à avancer.

– Etre et voir l’été.

– Ceux qui jonglent avec les idées devraient se souvenir que le jongleur se saisit de tout mais ne retient jamais rien.

Humour de papillotes? c’est de saison ! Mais dans son plus bel air, celui qui fait philosopher légèrement malgré l’engourdissement. Chaque phrase est un voyage. C’est un merveilleux petit livre pour ceux qui aiment lever le nez à chaque page pour sourire, penser et rêver. Les illustrations de Martin Jarrie sont parfaitement adaptées au projet du livre jouant avec une géométrie folle et mélangeant les formes.

Clarence Flûte et le secret de Sybille : le systême solaire modélisé

Clarence Flûte et le secret de Sybille
Sandrine Bonini
Autrement jeunesse, 2011

Physicien en herbe cherche âme soeur

Par Anne-Marie Mercier

Clarence flûte et le secret de Sybille .jpgCe titre annonce une nouvelle série, mais aussi l’introduction d’Autrement jeunesse dans le roman pour enfants. A travers un héros fort sympathique, le lecteur va découvrir qu’on peut s’intéresser aux sciences ailleurs que dans la salle de classe. Le parti pris est intéressant. On regrette cependant qu’il ait fallu passer par le cliché du garçon solitaire à lunettes, premier de la classe qui n’ose pas parler aux filles, donc un personnage qui sera perçu comme un peu ridicule par les jeunes lecteurs.

Pour le reste, le projet est assez réussi : Clarence, huit ans, après avoir réalisé un système solaire en marshmallows tente d’en créer un autre qui serait une image de son propre entourage. Les conditions de réalisation de l’expérience miment celles qu’installerait un vrai scientifique, ou un professeur des écoles qui souhaiterait faire comprendre la démarche scientifique à ses élèves. L’imbrication de questions sentimentales ou relationnelles dans le projet de Clarence est savoureuse tout comme les illustrations. Elle propose les plans, schémas, listes et donnent les étapes du « cahier d’expérience » qui scandent les perplexités du personnage.

Molière

Molière
Sylvie Dodeller
L’école des loisirs (médium documents), 2011

Molière, son temps, son oeuvre

par Anne-Marie Mercier

Molière  Sylvie Dodeller.gifL’école des loisirs réédite ici un titre de 2005 devenu indisponible. La vie de Molière, de son enfance à sa mort, n’est pas présentée dans la collection « belles vies », mais dans celle des « documents ». En effet, la biographie ne fait pas la totalité du volume même si elle en constitue l’architecture et la visée. Une grande part de l’ouvrage est consacrée à faire connaître le Paris du dix-septième siècle, la vie des écoliers, des acteurs, des courtisans… Un dossier iconographique très bien choisi est proposé en cahier central.

Cela n’empêche pas que le travail de Molière et les liens que l’on peut tisser entre sa vie et ses textes y soient souvent évoqués et que le personnage y apparaisse dans son humanité.

Une lecture intéressante qui connaît les moyens d’attirer un jeune lectorat sans pour autant négliger de remplir sa mission : faire connaître, faire aimer.

Airman

Airman
Eoin Colfer
Gallimard jeunesse (folio junior), 2011

Monte Cristo revu par Jules Verne

par Anne-Marie Mercier

Eoin Colfer, Anne-Marie Mercier,aviation,mine,Gallimard jeunesse (folio junior)Non, Eoin Colfer ne fait pas que du « Artemis Fowl », il écrit aussi de merveilleux romans d’aventures qui puisent à la fois à la source du roman populaire et à la veine de Jules Verne.
Dans des îles au large de l’Irlande, un petit royaume qui pourrait être d’opérette, s’il n’y avait un soupçon d’histoire (la distribution des terres d’Irlande par le roi Henri II à ses chevaliers) et d’utopie : le roi Nicolas qui règne sur ces cailloux ingrats arrive à en faire un royaume bien gouverné, sauf que…
Sauf que, ses mines de diamants sont exploitées de façon indigne par de malheureux bagnards et son ministre, issu d’une lignée de Templiers, lui cache cette vérité et complote contre lui. Le jeune héros est pris au milieu de cette histoire et se retrouve au bagne, ne subsistant qu’en changeant d’identité et de mentalité et ne vivant que pour sa vengeance (on songe au Comte de Monte Cristo), pour son amour (il aime la princesse Isabella son amie d’enfance) et pour sa passion (inventer une machine volante).
Beaucoup de suspens, de péripéties et d’humour font de ce roman qui manie avec brio les contrastes et les genres une très belle lecture. Il paraît en poche après avoir paru en grand format (2008).

Vango, t. 2 : Un prince sans royaume

Vango, t. 2 : Un prince sans royaume
Timothée de Fombelle
Gallimard jeunesse (grand format) Jeunesse, 2011

Au galop, en train, en dirigeable… sur un air de romarin

par Anne-Marie Mercier

vango2.jpgEn écrivant sur le premier tome de la série, j’avais exprimé une certaine déception (voir plus bas). Le deuxième tome (et le dernier) est superbe et lève tous les doutes. Il va à toute allure, en train, en avion, à cheval… et toujours en dirigeable, d’Amérique en Russie en s’arrêtant en France, en Italie et en Ecosse. Il multiplie les péripéties et les coups de théâtre, croise les genres et les styles. Les thèmes du roman populaire (enlèvements, sombres complots, prince caché, retrouvailles…) sont brassés de belle manière ; on trouve aussi un zeste de roman de guerre (ici, la montée du nazisme, l’occupation, la résistance), un peu de roman d’espionnage (gentiment antisoviétique comme dans l’ancien temps…on ne va pas trop creuser sur ce plan), et une pincée de roman sentimental. Tout cela est brassé avec talent et avec des moments d’humour (le commissaire et sa vieille mère sont joliment traités). Enfin, si le livre est fort bien écrit, les derniers chapitres sont superbes et évoquent avec poésie et acuité le désespoir, le désir et la nostalgie.

 On ne racontera pas, c’est impossible de toutes façons. Les héros ont de la présence  et de la prestance : Vango, l’orphelin traqué, Ethel et la Taupe, les solitaires, Andreï le violoniste, le père Zefiro, Mademoiselle, Basilio, etc. et l’horrible V. Victor. Tous les personnages du premier tome reviennent, y compris ceux que l’on croyait perdus. Tous les fils se nouent, on traverse l’Europe en guerre pour remettre une lettre, les destins se recroisent et les mystères liés origines de Vango se dévoilent. Le livre se clôt sur une odeur de romarin qui faisait l’un des charmes du premier tome.

Les Sciences naturelles de Tatsu Nagata : le cheval, le pou

Les Sciences naturelles de Tatsu Nagata : le cheval, le pou
Tatsu Nagata (alias Dedieu)
Seuil jeunesse, 2011

Histoires naturelles (bouffonnes ?)

par Anne-Marie Mercier

Sciences naturelles de Tatsu Nagata : le cheval, le pou Tatsu Nagata,Anne-Marie Mercier,pou,chevalDedieu,Seuil jeunesseSciences naturelles de Tatsu Nagata : le cheval, le pou Tatsu Nagata,Anne-Marie Mercier,pou,chevalDedieu,Seuil jeunesseVoilà la suite de la collection des histoires naturelles  après de nombreux autres albums (la vache, le castor, …) du grand scientifique japonais. Il est membre du « Tokyo scientific institute » (c’est écrit au dos de l’album et il y a une photo de l’auteur avec un tampon officiel, dessinés tous les deux, alors…).

Ces deux nouveaux albums sont, comme les précédents, très colorés et sont des merveilles d’humour.

Le pou pourra servir de consolation à ceux qui reviendront de colonie de vacances avec la tête habitée : vampire, pirate, « laid comme un pou », sous la loupe de Tatsu avec les mots et le crayon de Dedieu (l’un étant l’autre), voilà le pou apprivoisé.

Quant au cheval, il fait rire et rêver de grands espaces verts ou  bruns.

Les Malheurs de Sophie

Les Malheurs de Sophie
Comtesse de Ségur
Illustrations de Sophie de la Villefromoit

Seuil Jeunesse, 2010

Sophie illustrée

Par Anne-Marie Mercier

Cette réédition est proposée dans un bel objet à couverture cartonnée, au papier épais, à la mise en page soignée. Un bel emballage, redoublé par les rubans de différentes couleurs en tête des chapitres, les vignettes encadrant les titres et numéros de page…

Un côté « léché » qui conviendrait sans doute mieux aux petites filles modèles qu’à Sophie, et un aspect nostalgique qui plaira peut-être plus aux grands-mères qu’aux enfants. Mais les illustrations ne cherchent pas à gommer les aspérités de l’histoire. Elles proposent des profondeurs de champ (gros plan sur le pain et la crème), des points de vue radicaux (plongée sur Sophie sous la pluie, ou sous la pluie ; contre plongée sous Sophie grimpant à l’armoire…) et la représentation des personnages, notamment de Sophie, est savoureuse.

Jim pop, l’incroyable histoire de l’homme canon

Jim pop, l’incroyable histoire de l’homme canon
Tom Henni
Rouergue, 2011

Cirque de papier

par Anne-Marie Mercier

Tom Henni ,Rouergue,Anne-Marie Mercier,cirque,illustration (histoire de l')Grand album au format plus haut que d’ordinaire, au papier mat et épais, Jim Pop imite l’esthétique des illustrés des années 50 (quadrichromie qui bave un peu, couleurs franches). Ces couleurs imitent aussi celles du cirque : rouge, bleu, jaune, un peu de vert de temps en temps. Les formes schématiques se rapprochent du dessin d’enfant.
Tom Henni réussit le tour de force de faire exister un numéro de cirque rien qu’avec du papier, des mots et des couleurs. On y entre par une double page de garde, on en sort de même à la fin. Et pendant ce temps, le numéro de Jim Pop, l’homme canon, se déploie tout autour de la terre, emporté par son élan. On le voit en faire le tour dans la partie inférieure de l’image tandis que la partie supérieure montre les paysages qu’il parcourt, illustrant le rêve des enfants qui veulent croire à la merveille commentée par un M. Loyal enthousiaste.http://tomhenni.frLorsque les enfants grandiront, ils devineront peut-être le « truc » que quelques indices permettent de deviner. Oui, cette histoire est « incroyable »…
Pour les lyonnais : formé à Lyon et à Strasbourg, Tom Henni a créé l’identité visuelle de la librairie « Ouvrir l’œil », rue des Capucins et co-fondé le collectif « Mademoiselle, Messieurs » avec Émilie Chéron et Emmanuel Romeuf.
Pour les autres : on lit sur son site (http://tomhenni.fr) qu’il s’intéresse particulièrement à l’histoire du livre et aux techniques d’impression : ça se voit, et c’est tant mieux.