Ma première nuit à la belle étoile
Alex Cousseau
Rouergue (dacodac), 2010
Des peurs
Par Anne-Marie Mercier
Une situation simple : Cléo et son cousin ont l’autorisation de passer la nuit dans le jardin de la maison. C’est le cousin qui raconte. Il devine que Cléo a peur de quelque chose, raconte sa plus belle peur pour l’inciter à se confier. Tous deux résolvent l’apparent mystère et désamorcent l’angoisse en mangeant des cornichons (belle trouvaille).
C’est une histoire bien conduite, autour des peurs, peur de la nuit, de ce qu’on imagine qui n’est rien, de l’influence des images violentes de la télévision également. C’est aussi très bien écrit, presque trop : on a souvent l’impression que ce n’est pas le cousin enfant qui parle à sa cousine, mais bien un adulte sensible aux angoisses enfantines et qui se souviendrait des siennes.

Il arrive que les parents se mettent à débloquer. Parfois, un problème qui n’a pas été réglé dans leur jeunesse les empêche de se conduire de façon rationnelle. C’est ce qui arrive au père de Mia qui plante une tente dans son jardin et fait l’indien, attendant un signe, tandis que sa femme, compréhensive, patiente; sa fille, elle, s’inquiète de plus en plus.

Après Donner corps, DésOrdres, Prendre forme, Couleurs à sensation, Pour grandir il faut… et Haut comme trois pommes, la collection « Yapasphoto » du Rouergue présente un nouveau petit. Les illustrations, sous forme de photos très colorées, contemporaines et atemporelles à la fois, sur un support cartonné facile à manipuler, accompagnent un texte simple mais efficace qui fonctionne par association d’idées à hauteur de tout petit, comme le montrent les extraits suivants :
Une lune, des animaux, un arbre, tous en pâte à modeler brune (la couleur qui finit par dominer quand on a trop mélangé les couleurs), un fond de ciel bleu orangé, la tombée de la nuit. C’est le moment où les animaux se rassemblent, parlent à la lune et l’écoutent.
On aimerait aimer ce petit album, carré comme tous ceux de l’éditeur, au nom même du goût que l’on a pour le Rouergue. Pour le dessin aussi, fluide, au crayon rehaussé d’orange. Pour la bonne bouille du chat héros de l’histoire, sans doute nommé Mistigri (mais son nom disparaît rapidement pour la dénomination « le chat »).
Si les doudous n’existaient pas, il faudrait les inventer tant le thème du doudou perdu est présent aussi bien en littérature de jeunesse que dans les préoccupations quotidiennes des parents (et des enfants).
Couleurs à sensation est un petit livre intégralement dédié à l’image et aux « cinq sens ». Il est, d’abord, tout couleur, avec un bonheur puissamment contrasté de double page en double page. On s’aperçoit ensuite qu’il est tout jeu abstrait de formes et de structures : les couleurs si proches, et mêmes communes, de la barbe à papa ( ?) et de l’éponge ( ??) ou de la mie de pain ( ???) dessinent pourtant des univers d’une absorbante différence. De l’équation des couleurs et des formes résulte de façon directe l’évocation du goût et du toucher, et parfois de l’odeur. Tentons de dire la dynamique, et certes non la fin de ce voyage d’exploration photographique : il apparait enfin aussi que c’est tout simplement, tous yeux et peau dehors, de lumières que nous entretiennent ces images.