Tous pareils tous pas pareils

Tous pareils tous pas pareils
Michel Séonnet et Olivier Pasquiers
Rue du Monde, 2010

Identiques et pourtant si différents !

par Sophie Genin

9782355041204.gif« Ils grimpent dans des arbres… qui font du vélo sur une roue. Ils ont des maîtresses d’école… qui deviennent des parapluies quand il pleut.
Ils font des bonshommes de neige… qui font de l’ombre dans le désert.
Ils regardent avec des yeux… qui s’éclairent la nuit comme des phares. »

Voici le genre de phrases que l’on créée quand on joue avec le drôle de livre qu’est Tous pareils, tous pas pareils. Sur le principe des rencontres dues au hasard, la poésie surgit, laissant place à une évocation étonnante, des associations rigolotes ou plus graves qui donnent à réfléchir au lecteur, quel que soit son âge. Associez à ces petites trouvailles, très riches au niveau de la création langagière, des illustrations sous forme de photos en noir et blanc et vous obtiendrez un portrait coloré de l’enfance, une image variée de filles et de garçons du monde entier, accompagnés de nounours, tous pareils mais si différents !

somnambulettes

Somnambulettes
Martine Delerm
Grasset Jeunesse, 2009

Fabulettes pour apprentis poètes

par Sophie Genin

9782246750413.gifDes tons pastels, un univers poétique et féerique pour cette série d’instantanés présentant des personnages tels que Dame Lune ou un pêcheur d’étoiles. Ces lutins et autres farfadets apparaissent dans des illustrations douces, oniriques et surgissent au fil d’un texte écrit dans une langue imagée, comme une initiation à la poésie grâce à des rimes telles que
« Est-ce un chat somnambule,
Un lutin funambule,
Une fée qui fait des bulles ? »

Charles à l’école des dragons

Charles à l’école des dragons
Alex Cousseau et Philippe-Henri Turin

Seuil Jeunesse, 2010

Variante esthétique sur un lieu commun

par Christine Moulin

 charles.jpgDès qu’on le voit sur la couverture, on a envie d’aimer Charles, le petit dragon qui naît dans « un parfum de fin du monde […], au sommet d’une montagne, sur un nid de graviers » : ses yeux émouvants, implorants, pleins de tendresse et de tristesse, rappellent ceux du Chat Potté de Shrek. Bref, on fond… Tout comme ses parents qui trouvent qu’il est le plus beau dragon du monde.

Les illustrations, somptueuses, ne nous détrompent pas. Seulement, voilà : Charles, à l’école, au lieu d’apprendre à voler et cracher, écrit des poèmes (enfin, plutôt des vers de mirliton, si on en juge par sa production). On devine la suite : de marginal, il deviendra admiré de tous ; d’ « intello » souffreteux, dragon majestueux.

Le propos est donc connu, voire ambigu (l’humour noir de Les Trois loups, du même auteur, était plus revigorant !). Mais le format, les couleurs, le dessin, les cadrages, tout fait quand même de cet album un plaisir… pour les yeux.

Un Piano sur son dos

Un Piano sur son dos
Claude Clément, Sylvie Serprix

Grasset-Jeunesse, octobre 2010

 Claude Clément et la poésie devient musique

par Sophie Genin

9782246779513.gifClaude Clément a encore frappé et bien ! A nouveau, la musique l’inspire, comme elle le note en dédicace : « A mon compagnon, Serge Delbouis, qui fait vibrer l’âme des pianos, à Geneviève Stahl qui éclaira sa vocation, à Belline pour que résonne son piano intérieur… ».

Ce n’est pas la première fois que la mystère entoure le personnage qu’on voit naître puis grandir, caché sous le piano qu’une vieille dame viendra un temps faire vibrer. Ce n’est pas la première fois que Claude Clément nous propose de suivre un jeune homme dans un conte initiatique. Ce n’est pas la première fois que se dessine une écriture poétique présentant un refrain (« l’enfant rêva que les touches s’enfonçaient, que des petits marteaux frappaient, sur des cordes vibraient et qu’ainsi, le piano tout entier chantait… »). Mais l’amour porté à son compagnon a donné une nouvelle dimension à son écriture, dimension que l’on pourrait qualifier d’amoureuse, et pas seulement pour la belle rencontre avec une jeune fille tout aussi mystérieuse que l’artisan bricoleur d’instrument dont Claude Clément a fait son héros !

S’ajoute à ce très beau texte une illustration envoûtante qui permet au rêve éveillé de l’auteur de prendre littéralement corps sous nos yeux, grâce, en particulier, à l’abondante neige qui vient recouvrir par touches astucieuses la rencontre des deux amoureux et l’envol final du piano. Les contrastes proposés, couleurs chaudes du piano, des personnages et des animaux face au bleu froid récurrent qui prend tout son essor dans la scène de rencontre hivernale, font de chaque page de cet album autant de tableaux qui invitent, tout comme le texte poétique, à un voyage initiatique plus qu’agréable, réconfortant.

Le voyage de Kaouto le petit renne – Une épopée norvégienne pour l’enfance

Jan-Magnus Bruheim, Reidar Johan Berle
Le voyage de Kaouto le petit renne
Traduit du néo-norvégien par Aude Pasquier
Circonflexe, 2011

Une épopée norvégienne pour l’enfance

Par Dominique Perrin

renne0.jpg

Tu vas entendre l’histoire de Kaouto,
Le petit renne lapon de Kautokeino,
Qui a grandi en gambadant
Avec deux enfants, Matti et Aino.

(…) Le petit renne voulait rentrer, revoir
les aurores boréales et le soleil de minuit.
Chaque jour, il attendait Matti et Aino…
Il se languissait de son pays.

Voici un album de 1963 au statut assurément patrimonial à l’échelle de la Norvège, mais aussi à une échelle plus vaste. Republié dans la collection « aux couleurs de l’Europe » développée par la Bibliothèque internationale pour la jeunesse de Munich, il peut évoquer pour les lecteurs français quelques bijoux à dimension documentaire de la grande production du Père Castor, tout en s’en démarquant par son ampleur et sa forme. Il s’agit en effet d’un long récit que sa progression par strophes de quatre à cinq vers à la fois fort libres – du moins en traduction française – et attentifs à leurs effets sensibles rattache à une forme d’épopée pour la jeunesse : celle du voyage initiatique d’un renne résolu à retrouver les enfants dont il a été séparé pour être vendu à l’autre bout d’un pays long de plus de mille kilomètres de forêts et de neiges. Si la forme et le type de progression du texte sont assurément loin des habitudes actuelles – mais il y a bien de la fraîcheur dans la voix du poète qui hèle le jeune lecteur-auditeur –, l’image sobre et forte ne pâtit sans doute pas du même effet d’éloignement : les deux valent sans conteste le dépaysement.

Les chansons de Lalie Frisson

Les chansons de Lalie Frisson
Anne Lemonier, Claire de Gastold

L’ atelier du poisson soluble, 2010

Une forme originale qui mêle narration et poésie

par Frédérique Mattès

Les chansons de Lalie FrissonLes tribulations de Lalie Frisson. Lalie en  attendant ses parents qui sont allés chercher le petit frère à la maternité, se promène dans son quartier où elle doit affronter mille monstres imaginaires dont elle se défend en déclamant des poèmes qu’elle invente au fur et à mesure.

L’illustration, fantastique et redondante soutient agréablement le texte.

Un dragon dans la tête

Un dragon dans la tête
Pittau et Gervais

Gallimard Jeunesse, Giboulées, 2011

Le dragon chauve

par Christine Moulin

pittau,gervais,gallimard,ginoulées,poésie,liste,christine moulinPas plus de dragon dans cet album que de cantatrice, chauve ou non, dans la pièce d’Ionesco. Quoique : le dernier poème explique en quelque sortte le titre, sous le signe de l’absence, il est vrai, mais une absence qui donne sa chance à l’imaginaire : « Dans la forme/ Des nuages/ Je n’ai pas vu/ Des dragons fumants […]/ Tout ça/ Je l’ai vu dans ma tête/ Juste en fermant les yeux ».

En revanche, la poésie, elle, est là, et bien là. Fondée sur le goût des listes, très nombreuses, sur la célébration de l’infime (« La fourmi », La grenouille » « Un jour de soleil »), de l’intime aussi (« Caché bien caché »). Avec quelquefois des envolées plus larges (« Ici et là-bas », poème en miroir qui dit l’universalité des interrogations humaines ; « Trait pour trait » qui rappelle la difficulté et la joie d’être soi) mais aussi des incursions vers l’humour (« Un jour, un jour », ode à la procrastination), vers la poésie graphique (« Paysage en ville ») ou tout simplement vers l’évocation voilée, proche du silence, des chagrins enfantins (« Les petits chats »).

Les images,, mêlant formes modernes et simples à des collages nostalgiques, accompagnent les poèmes sans les illustrer lourdement, retenant un moment, une impression, proposant, au fond, une lecture, sans l’imposer.

Voilà un beau livre, grâce auquel « on peut caresser le ventre des nuages ».

Amos et les gouttes de pluie/Amos et les pissenlits

Amos et les gouttes de pluie/Amos et les pissenlits
Anne Cortey et Janik Coat

Autrement Jeunesse, 2011

Quand la poésie et l’absurde enfantent un héros attachant

par Sophie Genin

poésie,absurde,sophie geninpoésie,absurde,sophie geninLes deux petits albums, publiés en même temps chez Autrement Jeunesse, sont deux petits bijoux de simplicité et d’émotions.
En effet, ils mettent en scène une espèce de koala bicolore (bleu et rouge) aux yeux jaunes. Sur les couvertures, on le découvre sous son parapluie ou en train de souffler sur des fleurs de pissenlits qui s’envolent alors qu’il est assis sur une oie.
Au fil des images, présentées sous forme d’accordéon, on suit les aventures, toute simples, de ce petit personnage, auquel un jeune enfant s’idenfiera facilement, qui découvre le monde : la pluie et les fleurs de pissenlits pour l’instant, en espérant que d’autres suivront !
Ce « koala » tient un peu du personnage de La Linea, célèbre dessin animé des années 70, pour l’absurde des chutes. Celle de l’opus sur la pluie fait même penser à un tableau de Magritte intitulé « Golconde », mettant en scène une pluie d’hommes coiffés de chapeau melon. Est-ce à dire que ces petits livres ont une portée philosophique, oui, sûrement ! Et, en plus, on trouve même une référence aux oies de Nils olgersson, c’est dire la richesse de ces albums ! N’attendez plus, courrez découvrir ce nouveau héros !