Les Bêtes sauvages grandissent la nuit

Les Bêtes sauvages grandissent la nuit
Lucie Desaubliaux, Marine Schneider
Seuil jeunesse, 2023

Vaincre sa colère

Par Laure-Hélène Davoine

Cet album se démarque tout d’abord des autres par sa couverture. Un grand format. Un rose orangé éclatant, qui sera utilisé ensuite pour la lune. L’image d’un ours de dos, monumental et sombre, et dépassant de son épaule, une tête et deux bras de petite fille, minuscules en rapport. On ajoute le titre plutôt mystérieux et cela donne, dès la couverture, une ambiance troublante que l’on retrouvera tout au long de ce magnifique album.
Alix l’a décidé. Cette nuit, elle va devenir une bête sauvage. Elle s’enfuit de la maison, va se perdre dans la forêt et va y rester cinq jours et cinq nuits. Elle est fermement décidée à prouver au monde qu’elle n’est pas une petite fille mais une bête sauvage. Dans cette forêt, elle croisera de nombreux animaux : un oiseau avec qui elle jouera, des animaux de la forêt qui la repousseront et se moqueront d’elle, l’ourse de la couverture qui, tout en douceur, l’aidera à s’échapper, « car c’est trop dangereux ici pour une toute petite fille » et le grand loup blanc aux six queues, le Roi de la forêt qu’elle voudra défier et vaincre. Mais c’est contre elle-même qu’Alix se battra, contre sa colère qui l’attaque par derrière et qu’Alix dévorera jusqu’à la dernière bouchée, avant de retomber épuisée et apaisée. La forêt entière célèbrera ensuite cette bataille. Puis le grand loup ramènera la petite Alix endormie chez elle. La lune est toujours rousse mais Alix va pouvoir dormir tranquillement, le loup veille.
C’est un album dense, complexe, profond et visuellement remarquable. On suit le parcours initiatique de cette petite fille dans la forêt. On suit sa colère qui monte et qu’elle parvient enfin à expulser et à combattre. On finit l’album, apaisé, et puis on le relit… parce qu’on veut suivre à nouveau le cheminement de cette petite fille dans la forêt, sous la lune rousse.

 

La Course dans les nuages

La Course dans les nuages
Thibault Vermot
Sarbacane (‘Exprim’), 2022

Au-dessus de l’apocalypse

Par Anne-Marie Mercier

Salomé, la jeune héroïne du roman, belle figure d’orpheline résiliente, est aviatrice et relève un défi qui doit la conduire de Paris à Puerto-Montt (en Patagonie chilienne).  L’histoire se situe en 1938, après la mort de Mermoz, un peu avant celle de Saint Exupéry, et après la fin de la grande aventure de l’Aéropostale qui a donné un cadre à certains de leurs exploits. Salomé part au-delà des Andes pour gagner de vitesse un aviateur anglais dont on apprendra qu’il est lié avec les nazis, et pour venir en aide aux habitants de cette région, touchés par un gigantesque tremblement de terre. Elle est accompagnée par Edgar, journaliste débutant, dont la maladresse et l’ignorance fournissent de beaux moments de comédie.
L’aventure, précédée de longs préparatifs, ne commence qu’à la moitié du roman. Auparavant, on aura assisté à la rencontre entre les deux héros, exploré avec Edgar le travail de journaliste et avec Salomé l’histoire de l’aviation. Tout cela est fort intéressant mais la nature du roman change radicalement après le décollage : aux aléas de la traversée s’ajoutent des épisodes de combat, d’espionnage, de complot ; de beaux cauchemars ponctuent les rares moment de sommeil des pilotes. Enfin, leur arrivée dans une ville dévastée dans laquelle ne restent que des enfants (trop lents pour fuir avec les adultes qui les ont abandonnés) tient des meilleurs récits d’apocalypse.
Décidément, Thibault Vermot, après le beau Fraternidad, est à l’aise dans de nombreux genres et sait créer des héros, fragiles et résistants, très attachants.

 

Le projet hakana,

 Le Projet Hakana
Marin Ledun,
Rageot,  2023.

 Un roman d’aventures dans le temps et la réflexion sur la mort des civilisations

 Maryse Vuillermet

On est sur les îles Marquises en 1594, c’est-à-dire avant l’arrivée de l’homme blanc, 12 adolescents, garçons et filles appelés sentinelles, sept   scientifiques et deux légionnaires chargés de leur protection y ont été envoyés à titre expérimental par un programme scientifique de 2175 élaboré par l’Europe. Ce programme est destiné à trouver des endroits où l’homme occidental pourrait vivre puisqu‘il a détruit sa planète.
Mais tout ne s’est pas passé comme prévu, les jeunes sentinelles ont fraternisé avec les jeunes Marquisiens et Rim, la plus brillante et la plus belle, a eu une relation amoureuse avec Moana, un fils de chef, et elle est enceinte.
Et pour cette raison, elle ne peut pas être exfiltrée avec les autres à la fin de l’expérience.
Deux récits avancent en alternance, le récit du docteur Gauthier qui retrace les deux années passées sur l’ile et le récit de la guerre que vont se livrer les forces spéciales chargées de récupérer Rim et son bébé et la population marquisienne qui les protègent.
Rime et Moana fuient sur l’eau…
C’est un roman à la fois politique, écologique et d’aventures, plein de péripéties et de héros qui réussissent à changer leur destin et celui de leur peuple.
On peut dire que c’est aussi un roman féministe car la jeune Rim se bat à armes égales avec son compagnon et avec une intelligence rare
C’est encore un roman poignant et fort sur la destruction des civilisations hier et aujourd’hui.

Mille nuits plus une

Mille nuits plus une
Victor Pouchet
L’école des loisirs, 2021

Shéhérazade en baskets

Par Anne-Marie Mercier

« C’était à Vaishali, faubourg de Jaipur, dans les jardins de Sheyhavan »… La référence à Flaubert n’est pas tout à fait gratuite : ce petit livre qui multiplie bien des genres est aussi un manifeste qui célèbre les pouvoirs du conte, aussi bien de l’histoire racontée (à l’exemple de celles de la Shéhérazade des Mille et nuits) que de l’histoire écrite : l’héroïne devra son salut au texte qu’elle a écrit sur son aventure, texte qui commence par la même phrase que le roman, avec un bel effet de mise en abyme.
On est cependant plus proche encore des récits populaires : la nouvelle Shéhérazade, Shakti, est la fille du jardinier du maharadja Sheyhavan. Par un hasard digne de Pretty Woman (ou d’histoires de bergères et de prince), elle épouse le prince, son fils. Shakti s’ennuie dans sa prison dorée et conquiert une certaine liberté en racontant ce qu’elle voit et ce qu’elle entend, la cour et ses alentours, les vices cachés, les ridicules et les petitesses ; elle poste le tout jour après jour sur internet. Tout maharadja ayant un méchant vizir, celui-ci ne manque pas d’en être informé et d’organiser l’assassinat de la princesse, ainsi Shéhérazade rejoint le monde contemporain, coupable du crime de la liberté d’expression. Elle le rejoint aussi en captivant ses assassins désignés successifs avec des histoires qui ressemblent aux grands récits populaires de notre temps : Peter Pan, Batman, Le Seigneur des anneaux, etc.
Enfin, elle le rejoint à travers l’évocation de monde des lettres actuel, de l’édition et d’une maison d’édition en particulier, l’école des loisirs qui en publiant son histoire sauve la vie de Shakti, autre mise en abyme…
De belles illustrations en pleine page, comme la couverture, mêlent imaginaire indien et conte noir, tradition et modernité.
Seule ombre au tableau, le personnage du prince, très absent et distrait, dirait-on.

 

Ulysse. 1. Prince d’Ithaque

Ulysse. 1. Prince d’Ithaque
Pierre-Marie Beaude
Gallimard jeunesse, 2022

Enfance de héros

Par Anne-Marie Mercier

Même les héros ont une enfance, quand on cherche à développer le fil de leur histoire. Ainsi, le personnage d’Ulysse devient un peu plus accessible aux jeunes lecteurs qui pour le connaitre n’ont pas à attendre de pouvoir lire l’Odyssée.
Pour les lecteurs qui le connaissent déjà, ils découvriront avec plaisir des étapes nouvelles : la naissance, accompagnée de ses inévitables prophéties, l’amitié avec Achille, la conquête de Pénélope, et l’ombre grandissante de la guerre de Troie qui s’annonce.
Comme toujours dans les récits de Pierre-Marie Beaude, le style est fluide, la narration claire. En somme l’épopée ici se lit comme un roman. Elle tourne aussi parfois au récit de chevalerie (avec une scène proche du tournoi médiéval). C’est un joli mélange intemporel dans lequel la veine du roman d’initiation domine.

Capitaine Maman et le musée d’archéologie

Capitaine Maman et le musée d’archéologie
Magali Arnal
L’école des loisirs, 2022

Archéologie sans frontières

Par Anne-Marie Mercier

Le troisième volume de cette série met en scène une matriarchie : Capitaine Maman est une chatte, elle est accompagnée de Quartier-Maitre Mémé et de Chaton 1, Chaton 2 et Chaton 3, et d’un chiot surdimensionné par rapport aux autres personnages. Tous arrivent cependant à se caser dans un mini van qui les conduit vers l’aventure, dans les sables.
La découverte fortuite d’une tombe  antique accompagnée d’un trésor lance de nombreuses péripéties après que la capitaine a essayé en vain de travailler tranquille (belle occasion de montrer aux jeunes lecteurs comment s’organise un chantier de fouilles). Des pouvoirs de différentes régions concurrentes, les « autorités locales », viennent revendiquer la trouvaille, avec des soldats à cheval, des tanks, des hélicoptères, et des menaces.
Ruses, persuasion… tout finit bien grâce à l’organisation parfaite de Capitaine Maman qui est douée dans le maintien de la paix… et à son sous-marin. Un musée sortira de terre, co-administré par les anciens ennemis…
Les images lumineuses de Magali Arnal nous entrainent dans un monde de fantaisie drolatique qui égratigne gentiment la société de pouvoir, tout en regardant avec tendresse les morts des temps anciens et en traitant leurs restes avec douceur et respect.

 

Jonas, le requin mécanique

Jonas, le requin mécanique
Bertrand Santini, Paul Mager (ill.)
Grasset Jeunesse, 2023

Mort et renaissance d’une star du cinéma hollywoodien
(les étoiles sont éternelles)

Par Anne-Marie Mercier

On connait le goût de Bertrand Santini pour l’étrange, les histoires un peu sombres et l’humour grinçant  avec Miss Pook et les enfants de la lune, Hugo de la Nuit (Prix NRP de la revue des professeurs de collège ), et Le Yark (lauréat de nombreux prix, traduit dans une dizaine de langues adapté au théâtre sur des scènes nationales). Tout cela se retrouve, adouci, dans ce livre étonnant.
Jonas est un grand requin blanc, ou du moins il y ressemble : il a été utilisé pour un film à succès (on devine que c’est Les Dents de la mer de Spielberg, 1975) mais il n’a jamais bien fonctionné (comme son modèle). Dans ce roman, il finit sa vie dans un parc d’attraction sur les hauteurs de Hollywood, avec d’autres monstres comme Godzilla. Il est censé faire frémir les foules en dévorant une nageuse sous leurs yeux (enfin, en faisant semblant…). Après une énième panne, on décide de le mettre à la casse. Apprenant cela, ses amis décident de l’aider à rejoindre la mer (souvenez-vous, ça se passe à Los Angeles…, épique !). Une fois dans l’eau, il devient ami avec un manchot qui veut rejoindre le pôle, puis fait un dernier show (panique et chasse au requin avec un vétéran, comme dans le film), rencontre un autre requin (un vrai, ça se passe mal), a des états d’âme, risque la panne d’essence, rencontre une baleine…
La suite est renversante, on ne le gâchera pas en la racontant. C’est surprenant, très drôle, touchant, ça mêle le fantastique et l’effroi au conte de fées (la fée est bleue, bien sûr, comme l’océan et comme les images bleutées de Paul Mager. Ses planches en pleine page accompagnent superbement cet hommage au cinéma et à ses anciennes stars mécaniques, les ancêtres des effets spéciaux, qui s’achève en beau conte initiatique.

« Paul Mager est diplômé de l’école de cinéma et d’animation Georges Méliès. Depuis 2003, il a travaillé sur les personnages et décors de nombreux projets, comme Un monstre à Paris (Europacorp), Despicable me ou Minions (Universal studios). »

 

Comment j’ai appris à parler ours

Comment j’ai appris à parler ours
Didier Lévy, Anaïs Brunet (ill.)
L’école des loisirs (Mouche), 2022

Gloumou !

Par Anne-Marie Mercier

Si le titre laisse rêveur, le récit est encore plus farfelu. On y apprend que les ours sont sensibles à la poésie, surtout à Victor Hugo (contrairement aux loups). L’un d’eux, très collant avec le narrateur, sait manipuler un détecteur d’ours, vole ses pantoufles et, plus surprenant encore la photo de sa grand-mère.
On apprendra par la suite pourquoi cette grand-mère l’intéresse (et le narrateur découvrira ainsi une facette cachée de cette admirable vieille dame), ce qui entrainera les deux nouveaux amis dans une jolie aventure de libération des animaux en captivité.

Un lexique, à la fin, nous donne la clé de certains dialogues qui sans cela resteraient un peu obscurs (enfin ce n’est pas grave non plus : si vous voulez savoir ce que signifie Gloumou, allez voir).
Les belles images d’Anaïs Brunet, japonisantes, suffiraient à nous faire aimer cette histoire loufoque d’une amitié paradoxale qui s’achève en plaidoyer pour la cause animale.

 

La Lumière des profondeurs

La Lumière des profondeurs
Frances Hardinge
Traduit (anglais) par Philippe Giraudon
Gallimard jeunesse, 2022

Abyssal et lumineux 

Par Anne-Marie Mercier

Quel beau roman… Difficile à résumer tant il est riche et plein de suspense, original, poétique aussi dans une certaine forme d’horreur splendide. Il est aussi difficile à classer : il relèverait de la science-fiction ou de la fantasy dans la mesure où il présente un archipel inconnu à la technologie étrange. Il a été privé de ses dieux, et les derniers prêtres qui les ont servis et, pour certains, rencontrés, végètent dans le sanctuaire désaffecté, en attendant la fin. Les dieux sont morts, on ne sait comment (mais on le découvrira), et c’est sans doute une chance pour ces îles : ils étaient de gigantesques monstres marins dotés de mâchoires et de pinces énormes, cruels et stupides. On pense au calmar géant de Jules Verne, à Lovecraft et à ses dieux chitineux.
Le héros, Hark, est un orphelin qui vit dans les rues, lié par une longue amitié et des dettes de reconnaissance à un ami nommé Jelt, un peu plus âgé, violent et risque-tout. Jelt le pousse à oser ce qu’il ne ferait jamais seul et le met constamment en danger. Au début du roman, Hark est arrêté à cause de Jelt lors d’une tentative de vol, et est condamné à plusieurs années d’esclavage. Acheté par une scientifique qui mène des expériences sur les restes divins, les fragments des corps des dieux que l’on trouve encore dans les grands fonds, il est affecté aux soins des vieux prêtres du sanctuaire avec l’interdiction d’entrer en contact avec ses amis d’avant. Cette interdiction sera rompue, on le devine, avec plusieurs catastrophes en chaine qui risquent de conduire à la renaissance des dieux si le héros et ses nouveaux amis n’y veillaient.
Il forme une équipe improbable avec un très vieux prêtre et une jeune fille sourde et hydrophobe. Embarqués dans un mini sous-marin hurleur (il se propulse avec des vibrations sonores) et doté d’ailes, ils livrent un combat dans les profondeurs abyssales avec des forces terrifiantes, des monstres et des fanatiques comploteurs complotistes, et surtout avec le monde des Abysses, ses lumières, sa noirceur et ses dangers, vagues, tourbillons, etc. Cette plongée, les sensations des personnages, et surtout les bruits sont magnifiquement évoqués, à tel point qu’on en vient à entendre avec eux le silence après la séquence où ils sont au bord de l’évanouissement à cause de la violence des hurlements du petit sous-marin.
Hark, séducteur et menteur, assez insouciant et peu enclin à l’introspection au début du roman, est progressivement pris entre plusieurs conflits de loyauté. Il est aussi hésitant, entre la peur et le désir de changer. Il est en proie à des questions typiques de l’adolescence, notamment sur son identité (si je change, suis-je encore moi-même ? peut-on changer d’amis sans être un traître ? doit-on toujours suivre ceux à qui on doit de la reconnaissance ? qu’attendent de moi mes amis, que puis-je attendre d’eux ? un ami peut-il ne pas vous vouloir du bien ?…).
Les autres personnages sont eux aussi pris dans leurs contradictions : la savante qui hésite entre intérêt personnel et salut de l’humanité, l’ami Jelt, écorché vif entre amour et haine, Selphine, la fille de la cheffe impitoyable des contrebandiers des mers, en rupture avec son clan, sourde comme beaucoup de plongeurs de l’archipel, les «bénis par la mer». Enfin, tout cet univers de pêcheurs, commerçants, marins est décrit en détail et l’on voit surgir tout un monde avec ses sciences, ses techniques, ses superstitions, ses conflits politiques, et surtout ses peurs : détail fondamental, les dieux se nourrissent de la peur. Voila un ajout intéressant aux théories du XVIIIe siècle sur la naissance des Dieux.

Hagrildur le valeureux et la brigade du renne

Hagrildur le valeureux et la brigade du renne
Sandrine Bonini
Grasset jeunesse, 2022

 

« toute notre vie n’est qu’une suite de quiproquos
plus ou moins héroïques »

Par Anne-Marie Mercier

Il manquait peut-être au roman héroïco médiéval pour la jeunesse une équipe de bras cassés dans le style des Poulets grillés de Sophie Hénaff, ou de la série Slow Horses. C’est une belle compagnie qui se constitue dans ce roman, sans doute pour faire également série, autour d’un balourd, amateur de bière, rêveur, passablement stupide et vaniteux, Hagrildur, qui un beau matin décide de s’appeler Hagrildur le valeureux. Il se fait passer pour un chevalier afin de rencontrer la confrérie des chevaliers et de sauver au passage la belle comtesse Hulda. Chemin faisant, il recrute deux jeunes gens assez benêts et entêtés de leur collection d’autographes, tombe sur la confrérie des voleurs, etc. et si les aventures progressent c’est rarement grâce à lui ; mais tout cela avance dans un bon train et l’ensemble est réjouissant.
C’est aussi un joli petit livre à couverture cartonnée. Les illustrations en orange et gris sur fond blanc pastichant légèrement la veine médiévalo-viking sont de l’auteure dont on avait admiré l’imagination et le trait de plume dans Le Grand Tour (Thierry Magnier)