Castro
Reinhard Kleist
Traduit de l’allemand par Paul Derouet
Casterman, 2012
« Celui qui se consacre à la révolution laboure la mer » (Simon Bolivar)
Par Dominique Perrin
  « S’il est, dans l’histoire contemporaine, un personnage dont la vie exige, au-delà du livre et du film documentaire, d’être racontée sous forme d’une histoire en images, c’est bien Fidel Castro. Une vie tirée d’un roman d’aventures latino-américain, à cette nuance près qu’elle n’est pas fictive, mais vraie. […] Le guide de la révolution cubaine fut et reste un des acteurs les plus intéressants et les plus controversés de l’histoire récente […]. » C’est ainsi que le biographe allemand Volker Skierka (Fidel Castro. Eine Biographie, 2001) ouvre sa préface au manga créé à partir de ses travaux par Reinhard Kleist, traduit en France par Casterman dans la prestigieuse collection « écritures » aux côtés d’œuvres aussi différentes que celles de Taniguchi ou de Kim Dong-Hwa.
« S’il est, dans l’histoire contemporaine, un personnage dont la vie exige, au-delà du livre et du film documentaire, d’être racontée sous forme d’une histoire en images, c’est bien Fidel Castro. Une vie tirée d’un roman d’aventures latino-américain, à cette nuance près qu’elle n’est pas fictive, mais vraie. […] Le guide de la révolution cubaine fut et reste un des acteurs les plus intéressants et les plus controversés de l’histoire récente […]. » C’est ainsi que le biographe allemand Volker Skierka (Fidel Castro. Eine Biographie, 2001) ouvre sa préface au manga créé à partir de ses travaux par Reinhard Kleist, traduit en France par Casterman dans la prestigieuse collection « écritures » aux côtés d’œuvres aussi différentes que celles de Taniguchi ou de Kim Dong-Hwa.
Féru ou non d’histoire politique, le lecteur se voit emporté (sa surprise peut en être grande) dans une épopée collective des plus tumultueuses. Le médiateur de ce voyage est un personnage inventé, Karl Mertens, journaliste allemand parti à Cuba en 1958 avec le désir de « suivre » – au sens de couvrir mais aussi de soutenir – le mouvement d’émancipation cubain. Ce personnage fictif, marqué par le passé proche de son propre pays, fasciné par la révolution cubaine et par son leader, fait au lecteur le double récit du parcours de Castro et du sien, résolument solidaire du premier.
La magie de ce récit tient au caractère objectivement passionnant de la vie politique cubaine durant la seconde moitié du 20e siècle – la révolution castriste ayant fait face, on le sait, à dix présidents états-uniens successifs ; si Castro apparaît comme l’homme de discours qu’il a effectivement été, ce sont ici les actions et les faits – paroles comprises – qui font la trame du récit, et sont ainsi rendus accessibles aux amateurs de littérature graphique. L’autre grande force de l’œuvre réside dans son point de vue. Le journaliste Karl Mertens, représentant potentiel de l’européen de bonne volonté et de ses difficultés de positionnement, est ici le vecteur d’une mine d’informations de type factuel, mais aussi un sujet doué d’angles morts, non exempt de romantisme politique. Il n’apparaît cependant jamais – pas plus que Castro lui-même – comme justiciable d’un jugement facile et moins encore définitif, assumant jusqu’au bout à ses propres dépens sa fidélité à la révolution comme ascèse individuelle et collective.
« Pourquoi précisément Cuba ? », s’auto-interroge Reinhard Kleist au terme de l’ouvrage, évoquant son entreprise graphique et son premier voyage sur l’île en 2008 ; à cette question à la fois importante et subsidiaire, il répond successivement par les mots, et par une ultime série de dessins issus, sans médiation fictionnelle ni même narrative, de son carnet de voyage.
 
			


 Le chevalier d’Eon n’en finit pas de faire rêver ; ce nouveau roman d’Anne-Sophie Silvestre est à la hauteur du mythe : quiproquos, déguisements, voyages, dangers, mystères… on ne s’ennuie pas. Le personnage est hautement romanesque et ce premier volume amorce une série prometteuse. On y relate la jeunesse de celui que plus tard on appellera « la chevalière », ses débuts dans le monde, ses premiers pas comme travesti involontaire, puis espion du roi.
Le chevalier d’Eon n’en finit pas de faire rêver ; ce nouveau roman d’Anne-Sophie Silvestre est à la hauteur du mythe : quiproquos, déguisements, voyages, dangers, mystères… on ne s’ennuie pas. Le personnage est hautement romanesque et ce premier volume amorce une série prometteuse. On y relate la jeunesse de celui que plus tard on appellera « la chevalière », ses débuts dans le monde, ses premiers pas comme travesti involontaire, puis espion du roi.
 On peut dire que la « transportation » dans l’Italie des années 79 est totalement réussie car Anne Pouget, en historienne érudite sait multiplier les effets de réel transformant parfois ce roman en véritable cours d’histoire. Le lecteur participe ainsi de près à la vie quotidienne des foulonniers ou des gladiateurs et découvre ce qu’on mangeait à l’époque, ou l’état de la chirurgie. Aucun aspect n’est négligé, en passant des élections à la religion et à l’habitat au risque de digressions un peu longues parfois. Les commerçants de Pompéi nous deviennent quasi familiers. Mais nous ne saurons presque rien de l’éruption du Vésuve qui n’intervient qu’à la fin, créant cependant une tension permanente.
On peut dire que la « transportation » dans l’Italie des années 79 est totalement réussie car Anne Pouget, en historienne érudite sait multiplier les effets de réel transformant parfois ce roman en véritable cours d’histoire. Le lecteur participe ainsi de près à la vie quotidienne des foulonniers ou des gladiateurs et découvre ce qu’on mangeait à l’époque, ou l’état de la chirurgie. Aucun aspect n’est négligé, en passant des élections à la religion et à l’habitat au risque de digressions un peu longues parfois. Les commerçants de Pompéi nous deviennent quasi familiers. Mais nous ne saurons presque rien de l’éruption du Vésuve qui n’intervient qu’à la fin, créant cependant une tension permanente. Ni roman historique ni série pour les jeunes filles qui rêvent d’intrigues de Cour et de succès mondains, cette nouvelle série est un feuilleton tout à fait réjouissant qui prouve qu’on peut ouvrir certaines portes savantes tout en s’amusant. Anne-Sophie Silvestre avait déjà donné un roman sur Marie Antoinette découvrant Versailles tout à fait convaincant (il vient de paraître en poche, on en redonnera prochainement l’analyse). Elle s’attaque au même lieu sous un autre règne et dans un autre esprit.
Ni roman historique ni série pour les jeunes filles qui rêvent d’intrigues de Cour et de succès mondains, cette nouvelle série est un feuilleton tout à fait réjouissant qui prouve qu’on peut ouvrir certaines portes savantes tout en s’amusant. Anne-Sophie Silvestre avait déjà donné un roman sur Marie Antoinette découvrant Versailles tout à fait convaincant (il vient de paraître en poche, on en redonnera prochainement l’analyse). Elle s’attaque au même lieu sous un autre règne et dans un autre esprit. La jeune héroïne traverse tout cela au grand galop, grâce à son éducation exceptionnelle: son père l’a élevée comme un garçon, elle a un peu de culture, sait monter à cheval et se battre à l’épée ; elle se déguise en garçon lorsqu’elle veut être libre de circuler et échapper ainsi à la surveillance des gouvernantes de toutes sortes. Arrivée à contrecœur à la cour avec son lapin pour seul confident, elle s’y fait une amie et quelques ennemies, et surtout des amis, une société de garçons de haute volée, le premier cercle des compagnons du Dauphin et le Dauphin lui-même.
La jeune héroïne traverse tout cela au grand galop, grâce à son éducation exceptionnelle: son père l’a élevée comme un garçon, elle a un peu de culture, sait monter à cheval et se battre à l’épée ; elle se déguise en garçon lorsqu’elle veut être libre de circuler et échapper ainsi à la surveillance des gouvernantes de toutes sortes. Arrivée à contrecœur à la cour avec son lapin pour seul confident, elle s’y fait une amie et quelques ennemies, et surtout des amis, une société de garçons de haute volée, le premier cercle des compagnons du Dauphin et le Dauphin lui-même. Le titre pourrait faire croire que le roman s’inscrit dans la liste de ceux qui se passent à Versailles au cours de  » l’affaire des poisons  » dans laquelle madame de Montespan a été mise en cause (voir les romans d’Annie Jay, Complot à Versailles et d’Annie Pietri, Les Orangers de Versailles et leurs suites).
Le titre pourrait faire croire que le roman s’inscrit dans la liste de ceux qui se passent à Versailles au cours de  » l’affaire des poisons  » dans laquelle madame de Montespan a été mise en cause (voir les romans d’Annie Jay, Complot à Versailles et d’Annie Pietri, Les Orangers de Versailles et leurs suites). La suite des aventures du chevalier d’Eon suit la légende et non la vérité historique révélée par les chercheurs contemporains (G. Kates, A. Stroev…) : contrairement à ce qu’il a lui-même raconté, il n’a jamais été familier de l’impératrice ; il s’est d’ailleurs rendu en Russie plus tard qu’il ne l’a indiqué, pour y jouer un rôle de second plan, sous une identité masculine.
La suite des aventures du chevalier d’Eon suit la légende et non la vérité historique révélée par les chercheurs contemporains (G. Kates, A. Stroev…) : contrairement à ce qu’il a lui-même raconté, il n’a jamais été familier de l’impératrice ; il s’est d’ailleurs rendu en Russie plus tard qu’il ne l’a indiqué, pour y jouer un rôle de second plan, sous une identité masculine.